Chapitre II

Où l’on verra la silhouette d’un nommé Parlo-Soulet, ou Parle-Seul, qui inventa le monologue, et le bon tour que jouèrent aux gendarmes Maurin des Maures et son muet associé.

La fierté nationale exige que, au moment où l’on feint d’être dupe de la galégeade, on laisse entendre, au moins une petite fois, qu’on ne s’y est pas laissé prendre.

Un des auditeurs sauva la dignité de tous en disant :

« Ah ! ça, vaï, tu galèges ! »

Et de rire. Maurin triomphait, grave. Certain alors de dominer son public, Maurin, s’adressant à celui qui venait de parler, prononça d’un ton goguenard :

« C’est les gendarmes d’Hyères, ça, dis-moi, Louiset ?

– Oui, ceux d’Hyères, fit Louiset, un jeune paysan d’allure effrontée, au feutre à bord étroit penché sur l’oreille ; ceux d’Hyères. N’as-tu pas vu leurs chevaux attachés à l’anneau ? Ceux de Bormes vont à pied.

– Et, poursuivit Maurin, qu’est-ce qui les oblige à sortir de leur commune, ceuss d’Hyères ?

– On leur a commandé de poursuivre trois coquins, qui ont pris la route de Cogolin.

– Et c’est comme ça qu’ils vont à Cogolin ? fit Maurin dont la belle humeur augmentait. Ils y vont assis sur des chaises ? M’est avis que, de ce train-là, ils n’y seront pas demain, à Cogolin ! Et peut-être qu’ils n’ont pas tort, car les gens qu’ils cherchent pourraient bien être restés derrière eux, du côté d’Hyères ! »

Et Maurin, sur ce mot, se mit encore à rire de bon cœur, si haut que les verres tintaient sur les tables autour de lui. Son rire montrait dans sa face brune des dents blanches, bien rangées, serrées, éclatantes, des dents de loup.

Le beau gendarme louchait et se mordait la moustache.

« Qu’avez-vous à rire si fort ? » se décida-t-il à dire, impatienté.

– Ce que j’ai ? cria Maurin ; j’ai que vous leur avez passé sur la tête, à vos trois coquins. Ah ! ah ! oui, ma foi, sur la tête ! Et comment cela ? C’est qu’ils étaient sous le pont, à moins d’une lieue d’ici, à l’endroit où de la route de Cogolin se détache la nouvelle route de Bormes. Quand je suis passé sur le pont il faisait jour encore… Et vous, faisait-il jour, quand vous y êtes passés ?

– Il faisait encore jour, répondit l’autre gendarme.

– Alors vous auriez pu voir comme moi, dans la poussière, si vous aviez des yeux, les traces de pas de ces hommes, écrites en travers de la route, sur le bord, et dessinées en poussière blanche sur l’herbe écrasée du talus. Moi, j’ai remarqué ça en passant et j’ai cherché sous le pont. Et j’ai vu trois pauvres bougres. Ils m’ont demandé du tabac. Et je leur en ai donné… Ah ! ah ! vous leur avez passé sur la tête !… Je parie que vous galopiez, eh ? »

Et le rire de Maurin, communicatif, gagna l’assemblée.

« De ce Maurin, pas moins ! qué galégeaïré ! » disait-on à la ronde. »

Le gendarme se fâcha. Être persiflé sous les yeux de celle qu’il nommait en lui-même sa future, cela lui fut insupportable.

« Avez-vous fini de rire ? » cria-t-il.

Et Maurin, tranquille :

« Pas encore, brigadier.

– Je ne suis pas brigadier.

– Lieutenant alors ! répliqua Maurin, de plus en plus narquois.

– Ah ! ça, vous vous f… ichez de moi ! »

Le gendarme s’était levé : Maurin aussi. La Corsoise, toute pâle, les regardait. Toute la race de cette fille lui revenait aux yeux et dans le cœur. Suspendue aux mouvements des deux hommes, inconsciente et superbe, elle ne savait pas qu’elle attendait le vainqueur pour se donner un maître. Son masque était immobile. Cependant ses narines, ouvertes comme des naseaux, aspiraient l’air avec force, et de temps en temps ses lèvres, imperceptiblement, vibraient, ce qui la rendait beaucoup plus jolie.

Maurin crut sentir que cette fille serait à lui s’il achevait de rendre comique l’attitude de son gendarme. Et à cette espèce de question : « Ah ! ça, est-ce que vous vous f… ichez de moi ? » il répondit, d’un grand sang-froid, en bon français provençal, aussi sonore que du patois corse : « Parfétemein !

« Injure aux agents de l’autorité en service ! » proféra le gendarme avec un accent officiel inimitable.

Et baissant le nez, il chercha dans sa sacoche de cuir fauve un papier à procès-verbal.

« En service ! cria Maurin, celle-là est forte. À cheval sur une chaise, le gendarme n’est pas en service ! »

Tout le monde s’était levé, et tandis que le gendarme apprêtait son papier et réquisitionnait un encrier, Maurin sortit, protégé par des groupes complices. Il avait cligné de l’œil : on avait compris que le galégeaïré allait jouer aux représentants de la loi un tour de sa façon.

Les gendarmes ne songeaient d’ailleurs pas à l’empêcher de sortir. Il ne s’agissait pas d’une arrestation. Pour un simple procès-verbal, il leur suffisait d’être sûrs de l’identité de leur homme.

Or, en même temps que Maurin, l’un des assistants, que le fameux braconnier n’avait pas eu l’air de connaître et qui n’avait pas prononcé une parole, avait disparu silencieusement.

C’était un certain Pastouré, dit Parlo-Soulet, c’est-à-dire Parle-Seul, homme de puissante stature, colosse naïf, admirateur de Maurin et son compagnon favori ; mais Pastouré jugeait utile de ne pas afficher hors de saison son amitié pour le Roi des Maures, qu’en toute occasion il servait de son mieux.

On ne voyait pas souvent Maurin et Pastouré causer ensemble. Même au fond des solitudes, Pastouré (c’était, comme il le disait, sa nature) adressait rarement la parole à ses compagnons de chasse.

En revanche, lorsqu’il était ou se croyait complètement seul, il bavardait à voix haute avec de grands gestes. Cet homme était l’incarnation du monologue. Quant à ses gestes, ils étaient célèbres. On le voyait parfois, en silhouette sombre sur le bleu du plein ciel, au sommet d’une colline, agiter ses longs bras comme un télégraphe. C’est qu’alors il se désignait à lui-même les chemins stratégiques par où il devait passer pour forcer un sanglier ou retrouver une compagnie de perdreaux.

Pastouré était donc sorti un peu avant Maurin, il avait détaché, toujours en silence, l’un des chevaux des gendarmes ; et maintenant Maurin, à ses côtés, détachait l’autre.

Deux secondes plus tard, dans l’encadrement lumineux de la porte ouverte, Maurin des Maures apparut à cheval. Parlo-soulet, également à cheval, se tenait modestement dans l’ombre. Maurin portait sur l’échine son carnier, quarante livres ! et son fusil à deux coups.

« Votre procès-verbal, cria-t-il, vous le ferez maintenant pour quelque chose… Attrapez-moi si vous pouvez !… À ce jeu-là, je vous ferai tomber vos joues de pommes d’api, gendarme Sandri ! »

Il riait. Le gendarme bondit vers la porte. Maurin tourna bride et disparut. On entendit quelque temps le galop des deux lourdes bêtes.

Elles battaient la route qui longe le torrent au fond de la gorge, entre les hautes collines.

« Comment ! il a pris les deux chevaux ! criaient les gendarmes.

– Ils ont l’habitude d’aller ensemble, vos chevaux ; l’autre a suivi le premier, répliqua l’un des assistants au milieu des rires.

– Il me le paiera cher, ce Maurin ! » cria le gendarme aux joues roses, qui n’avait pas remarqué la disparition de Pastouré.

Et il se mit à disputer violemment avec son camarade sur la conduite à tenir ; finalement ils renoncèrent à poursuivre, à pied, leurs montures, et se mirent séance tenante à rédiger leur rapport. Tâche difficile !

Une heure s’écoula.

La Corsoise tout à coup se leva pour aller écouter sur le pas de la porte. Elle restait là, songeuse.

Au bout d’un assez long temps :

« Les chevaux !… Ils reviennent ! » s’écria-t-elle.

Tous les buveurs s’élancèrent sur la route.

Les chevaux arrivaient… Leur galop se ralentit. Les gens se communiquaient leurs réflexions :

« Ils s’arrêtent… chut !… Voici qu’ils repartent… ils arrivent ! ils arrivent ! »

On entendait maintenant le bruit d’un double trot…

« Ils arrivent ! les voici ! »

Dans le carré de lumière que dessinait sur la poussière du chemin la porte ouverte de l’auberge, les deux puissantes bêtes sans cavaliers s’arrêtèrent tranquillement.

Les gendarmes aussitôt furent en selle.

« Où allez-vous à cette heure ? leur cria-t-on. Croyez-vous que Maurin vous attende sur la route ? Il doit être en plein bois, – de sûr ! Attendez ici jusqu’à demain ! »

Les gendarmes n’entendaient plus rien.

Persuadés que la grande ruse de Maurin serait de regagner tranquillement sa maison, comme le dernier endroit où l’on songerait à le rencontrer, – ils galopaient vers Cogolin et Grimaud. Là, dans la plaine marécageuse, à cinq cents pas de la mer, au bord du golfe, Maurin avait une maison à lui. C’était une cabane en planches de pin. Cette cabane, les gendarmes la connaissaient… Et ils galopaient.

Les buveurs rentrèrent dans la grande salle de l’auberge : on pourrait veiller un peu tard, c’était un samedi. Pas besoin de se lever de bonne heure le lendemain, le dimanche n’étant pas pour les chiens, mais pour les chrétiens.

Or, qu’étaient devenus les deux braconniers ?

Après avoir galopé « une lieue de chemin », Maurin et Pastouré, modérant leur allure peu à peu, s’étaient mis au pas, puis s’étaient arrêtés :

« M’est avis, avait dit Maurin, qu’il faut, maintenant qu’on nous croit bien loin, retourner en arrière.

– Retournons ! avait répliqué le laconique et docile Pastouré.

– Et sais-tu pourquoi nous retournons ? avait dit Maurin.

– Pas encore, mais si tu me l’expliques tout de suite, je le saurai aussitôt », avait répliqué le gigantesque Parlo-soulet.

Ayant tourné bride, Maurin avait dit à son compagnon qui imitait tous ses mouvements :

« Quand nous serons revenus pas très loin de l’auberge, nous descendrons de cheval. Nous chasserons les deux bêtes avec un bon coup de pied au derrière. Ces chevaux de gendarmes sont des animaux très bien apprivoisés, ils retourneront d’eux-mêmes à l’auberge ; ils sauront retrouver leurs maîtres. Alors, pour sûr, les deux militaires monteront dessus et nous iront chercher à Cogolin ou à Sainte-Maxime. Pendant ce temps nous gagnerons au large, à travers bois.

– Maurin, avait répondu Pastouré, tu as vraiment un génie bien agréable. Faisons comme tu dis. »

Et ils avaient fait ainsi.

Cinglés d’un grand coup de ceinture de cuir, les chevaux avaient détalé dans la direction de l’auberge.

Là-dessus Maurin avait dit :

« Bonne nuit, Parlo-soulet, tirons chacun de notre côté à travers bois, bonsoir ! »

Ils s’étaient séparés. La nuit était profonde, ils entrèrent dans les broussailles et gravirent les premières pentes de la colline. La route, au-dessous d’eux, disparaissait, pâle un peu dans le noir.

À peine s’étaient-ils quittés que Parlo-soulet, dans le sentier rocailleux et sonore, s’assit sur une roche. Inclinant la tête, il prêta l’oreille :

« Tiens ! fit-il à voix haute. Le bougre déjà ne s’entend plus. Avec ses espadrilles, il s’est fait le pas d’un renard ! »

On n’entendait en effet que le balancement des branches vibrantes, agitant leurs myriades d’aiguilles traversées par le vent ; puis le galop de deux chevaux passa en ouragan sur la route, à vingt pas de Pastouré ; c’étaient les deux gendarmes qui, trompés par l’habile manœuvre des braconniers, filaient vers Cogolin où ils se croyaient sûrs de les retrouver !… ils passèrent, et la route tremblait sous leur galop dont l’écho des collines répétait le bruit de tonnerre de plus en plus éloigné… puis ce fut, de nouveau, le grand silence.

Alors Parlo-soulet parla.

Il parla d’une voix nette, claire, comme il eût fait pour être entendu d’un camarade un peu sourd :

« Noum dé pas Dioû !… fit-il, en voilà une, d’histoire ! Elle est drôle, celle-là ! Elle vaut les autres histoires du même Maurin ! Je l’aime bien, cet animal, mais ce n’est pas pour dire, il me fera, quelque jour, finir en galères ! »

Cette expression de noum dé pas Dioû est le juron des Provençaux qui ne veulent jurer que pour rire… La négation pas, en effet, détruit le blasphème… Noum dé pas Dioû est une galégeade à l’adresse du diable. Le diable croit qu’on jure… et il se trouve bien attrapé !…

Pastouré continuait ainsi son monologue :

« Quelle diable d’idée il a eue d’attaquer sur leur chaise ces gendarmes qui ne lui disaient rien ! Et tout cela, je le devine, parce que la petite Tonio lui a plu tout d’un coup comme jamais elle ne lui avait plu auparavant ! Il a compris que le joli gendarme la reluque ; et de laisser un gendarme aimer une jolie fille sans la lui prendre, ça n’est pas possible à un Maurin !… Mais pourquoi, moi, quand il est sorti, suis-je sorti avec lui ?

« Pourquoi surtout ai-je pris l’autre cheval quand il est monté sur le premier ? Je n’en sais, ma foi de Dieu, rien du tout ! Où il va, il faut que j’aille, je ne sais pas pourquoi. Les idées qui lui viennent, jamais à moi ne me viendraient ; mais dès qu’elles lui sont venues, elles me plaisent, et même quand je ne les approuve pas, elles me plaisent encore et me font faire des bêtises, et je le suis, cet homme, comme le suit son ombre, et je le suis même quand il n’a pas d’ombre faute de soleil ou de lune ! Et c’est pourquoi, maintenant, me voilà avec lui dans de beaux draps !

« Prendre à des gendarmes leurs chevaux, ça n’est pas petite affaire, et nous allons être poursuivis maintenant de jour et de nuit, je parie, par ces gendarmes et par les gardes et par les maires et par les juges… Ah ! gueulard de Maurin ! voilà où tu m’as fourré à ta suite ! Moi du moins je n’aurai contre moi que la gendarmerie et les maires et les préfets, mais toi, de plus, tu auras la fille ! Une fille, et une Corsoise ! Mon pauvre Maurin, comment te vas-tu tirer de là ? Des filles, n’en avais-tu pas tant qu’il te plaît, et des femmes de tous les âges et de tous les plumages, – même en chapeau ? Mais il te faut une Corsoise ! et il t’en cuira, je te l’annonce. Une Corsoise fiancée à la gendarmerie et fille d’un garde-forêts ! il t’en cuira, et, té ! c’est moi qui te le dis, Maurin, – tu t’es comporté, ce soir, avec cette aventure, comme un âne, m’entends-tu, comme un âne, je te le répète ! »

Sur ce mot, le monologue de Parlo-soulet fut interrompu par une voix forte, qui sonna clair dans la nuit noire :

« Ne me dis pas du mal de moi, Parlo-soulet ! que je suis là ! et que je pourrais te croire ! Ah ! c’est comme ça que tu te parles sur mon compte quand tu penses que je n’entends pas ? »

C’était la voix de Maurin. Persuadé que Parlo-soulet à son habitude allait se mettre à parler tout haut dès qu’il se verrait seul, Maurin s’était assis à quelques pas de lui pour l’écouter à son aise.

« Et tu crois bonnement, répliqua la voix calme de Pastouré, que je ne te savais pas là ? Je te savais là, mon homme, et bien aise j’en étais, car je ne parle volontiers qu’étant tout seul ou quand je me semble seul… Ce qui pour moi est tout comme… N’avance pas, que, si je te voyais, je ne me dirais plus rien !…Et surtout ne réponds pas !… Si je parle seul, âne que tu es, ce n’est pas sans raison, tu penses. Il y a longtemps que tu le devrais savoir, c’est parce que je n’aime pas les oui, les non, les mais, les si, les mais alors. Dès qu’on est deux, l’un dit blanc, l’autre dit noir, et l’on se dispute.

« Tout seul, on a bien assez de mal à faire le jour dans ce qu’on pense, sans aller s’embarrasser de répliques et de querelles… Parler seul, c’est comme d’écrire une lettre qu’on n’envoie pas. Point de réponse alors ne vous embête en retour. Et, cette fois, si j’ai parlé seul pour que tu m’entendes, te sachant là, c’est que j’ai cru qu’étant présent en cachette, tu n’oserais répondre et que, pour une fois, il me plaisait de te donner mon bon avis qui serait un bon avis s’il ne venait pas trop tard. À présent, tais-toi, et dis-moi, que faisons-nous ?

– Que je me taise, et que je te dise quoi faire ? dit Maurin qui se rapprochait en riant à gorge déployée. Ah ! que tu es bien toi, Parlo-soulet, plus gai toujours quand tu es sérieux que si tu galégeais comme moi !… Quoi faire ? faire à nous deux ce que tu aurais fait tout seul, je parie ! Rentrer à l’auberge ; et tu finiras ta partie d’écarté avec tes « cambarades » ou plutôt tu en feras une avec moi… que je l’ai bien gagnée. »

Et pendant que les gendarmes poursuivaient leur route vers Cogolin sur leurs chevaux éreintés, Maurin, dans la grande salle des Campaux, disait à Parlo-soulet :

« Du trèfle ! et du trèfle ! je gagne la partie, mon homme !

– Pourvu que ça continue, pauvre toi ! répondit Pastouré, mais j’ai bien peur que les gendarmes ne gagnent la belle contre nous deuss ! »

La Corsoise, assise près de son père, les regardait jouer.

« Belle demoiselle, lui dit Maurin, vous accepterez bien un verre de fenouillet, qué ? parce que quand je gagne je régale !

« Et votre père, lui aussi, acceptera de trinquer avec nous ?… Grivolas, un verre ! »

Mais Grivolas l’aubergiste ronflait sur sa chaise, le dos au mur.

« Margaride ! » cria Maurin.

La servante de l’aubergiste accourut. C’était une belle fille, à qui le gendarme Sandri faisait une cour peu honnête en attendant l’heureux jour où il pourrait devenir le légitime époux de Tonia la Corsoise.

« Margaride, dit Maurin, donne-nous quatre verres de fenouillet, et du meilleur.

– Deux verres suffiront, dit alors le père de la Corsoise. Vous devriez comprendre, maître Maurin, qu’un garde-forêts ne doit pas trinquer avec vous juste dans le moment où ses amis les gendarmes sont à votre poursuite. Vous voilà passé bandit. Et je devrais peut-être vous arrêter moi-même… Un Français du continent n’y aurait pas manqué à ma place. Tout ce que je peux faire pour vous, en ma qualité de Corse, c’est de me retirer comme si je ne vous connaissais pas… Allons, viens, Tonia, rentrons chez nous. »

Et Orsini se retira avec sa fille qui souriait à Maurin.

Quelle suite allait être donnée au procès-verbal des deux gendarmes, – voilà ce qu’attendait avec impatience et curiosité tout le pays des Maures, qui aimait Maurin.

Et comme il devenait ainsi un peu bandit à la manière corse, la Corsoise s’était mise tout naturellement à le trouver fort à son goût.

Et puis, il contait si bien les gandoises (les histoires de son invention), ce galégeaïré !

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