XX. Le Cèdre-Rouge

Maintenant que nous avons expliqué les incidents qui avaient eu lieu pendant les six mois écoulés depuis la mort de doña Clara jusqu’à la conversation de Valentin et de don Pablo dans la grotte de l’ours pendant l’orage, nous reprendrons notre récit au point où nous l’avons laissé en terminant le troisième chapitre.

À peine quelques minutes après que le fils de l’hacendero fut sorti, la porte du jacal fut ouverte brusquement et quatre hommes entrèrent.

Ces quatre hommes étaient le Cèdre-Rouge, Fray Ambrosio, Sutter et Nathan.

Ils paraissaient tristes et soucieux ; l’eau dégouttait le long de leurs vêlements comme s’ils sortaient de la rivière.

– Holà ! dit le moine. Comment ! ni feu ni lumière, rien sur la table pour nous recevoir ! Vous vous souciez peu de nous, il me semble.

Le Cèdre-Rouge baisa sa fille au front, et se tournant vers Fray Ambrosio, à qui il jeta un regard de travers, il lui dit d’une voix rude.

– Vous êtes ici chez moi, mon maître ; ne m’obligez pas à vous en faire souvenir : ainsi commencez par être poli avec ma fille, si vous ne voulez pas que je vous remette à votre place.

– Hum ! fit le moine en grommelant : est-ce donc l’arche sainte, cette jeune femme, pour que vous preniez ainsi la mouche au moindre mot qu’on lui adresse ?

– Je ne prends pas la mouche, répondit brusquement le squatter en frappant du poing sur la table ; seulement vos façons d’agir et de parler ne me conviennent pas et je vous le dit : ne m’obligez pas à vous le répéter.

Fray Ambrosio ne répliqua pas ; il comprit que le Cèdre-Rouge était dans une disposition d’esprit peu favorable à une discussion, il s’abstint prudemment de toute réflexion qui aurait pu envenimer la question et faire éclater une querelle dont il se souciait d’autant moins que le squatter semblait la désirer.

Pendant l’échange des quelques mots qui précèdent, Ellen, aidée par ses deux frères, avait allumé une torche de bois-chandelle, ranimé le feu dont le besoin commençait à se faire sentir, et couvert la table d’un repas, sinon confortable, du moins suffisant.

– Caballeros, dit-elle de sa voix douce, vous êtes servis.

Les quatre hommes s’assirent autour de cette table avec l’empressement de gens affamés qui ont hâte de rompre un long jeûne.

Cependant, avant de porter le premier morceau à ses lèvres, le squatter se tourna vers sa fille.

– Ellen ! lui dit-il avec bonté.

– Mon père, répondit-elle en s’approchant vivement de lui, que désirez-vous ? Vous manque-t-il donc quelque chose ?

– Ce n’est pas cela, enfant, reprit-il, il ne nous manque rien, du moins, je le crois.

– Qu’est-ce donc, alors ? fit-elle d’un air étonné.

– Pourquoi, reprit-il, ne vous placez-vous pas près de nous.

– Vous m’en dispenserez, mon père, je n’ai pas faim ; il me serait réellement impossible de prendre la moindre des choses.

Le squatter soupira ; mais, sans faire d’objection, il commença à servir les convives, tandis qu’elle se retirait dans le coin le plus obscur du jacal.

Le repas fut triste ; les quatre hommes paraissaient préoccupés, ils mangeaient vite et en silence.

Lorsque leur faim fut assouvie, ils allumèrent leurs pipes et fumèrent.

– Père, dit tout à coup Nathan au Cèdre-Rouge qui regardait mélancoliquement la fumée de sa pipe monter en tournoyant vers le toit du jacal, j’ai retrouvé des pistes.

– Moi aussi, observa le moine.

– Et moi aussi, dit le squatter ; après ?

– Après ! fit Fray Ambrosio, canarios, compadre, vous le prenez bien gaiement ! Des pistes dans le désert décèlent toujours un ennemi.

– Qu’est-ce que cela me fait ? dit le Cèdre-Rouge en haussant les épaules.

– Comment, qu’est-ce que cela vous fait ? s’écria le moine en bondissant ; je trouve le mot charmant, par exemple ; on dirait, à vous entendre, que vous êtes entièrement étranger à la question, et que votre vie n’est pas en jeu comme la nôtre.

– Qui vous dit que je veuille la défendre ? répondit brusquement le squatter en lui jetant un regard qui, malgré lui, l’obligea à baisser les yeux.

– Hum ! fit le moine après un instant de silence, que vous ne teniez pas à la vie, je le conçois, vous en avez assez usé de toutes les manières, soit dit sans reproche, pour que vous ne la regrettiez pas, mais il est une chose que vous oubliez, compadre, sans vouloir ici vous parler de moi qui, cependant, serais en droit de vous adresser quelques reproches parfaitement fondés.

Le squatter secoua insoucieusement la cendre de sa pipe sur la table, la bourra une seconde fois, la ralluma, et se remit impassiblement à fumer sans paraître attacher la moindre attention aux paroles du moine.

Celui-ci fronça les sourcils en serrant les poings, mais, se remettant presque aussitôt, il continua avec une feinte indifférence tout en jouant avec son couteau.

– Oui, vous oubliez une chose, compadre, qui cependant vaut bien la peine qu’on s’en souvienne.

– Quoi donc ?

– Vos enfants, caspita !

Le squatter lui lança un regard ironique.

– Oh ! por Dios santo ! reprit le moine, je ne parle pas ici de vos fils, ce sont deux hommes forts et résolus qui se sortiront toujours d’affaire ; je ne m’inquiète nullement d’eux.

– De qui donc vous inquiétez-vous alors ? lui demanda le squatter en le regardant fixement.

– De qui je m’inquiète ! reprit le moine avec une certaine hésitation.

– Oui.

– De votre fille Ellen, canarios ! Que deviendra-t-elle si vous mourez ? dit le moine avec cette hardiesse des gens peureux qui veulent savoir tout de suite si la mine à laquelle ils ont mis le feu les écrasera.

Le squatter hocha tristement la tête.

– C’est vrai, murmura-t-il en jetant un regard à sa fille.

Le moine sourit, le coup avait porté ; il continua :

– En vous perdant vous la perdez, dit-il ; votre obstination peut causer sa mort, prenez-y garde !

– Que faire ? dit le Cèdre-Rouge.

– Prendre nos précautions, voto de Dios ! Croyez-moi, nous sommes épiés, rester plus longtemps ici est commettre une grave imprudence.

Les fils du squatter baissèrent affirmativement la tête.

– Il est évident, observa Sutter, que nos ennemis ont découvert nos traces.

– Et qu’ils ne tarderont pas à être ici, appuya Nathan.

– Vous voyez ! reprit le moine.

– Encore une fois que faire ? demanda le Cèdre-Rouge.

– Caspita ! déguerpir le plus tôt possible.

– Où aller à cette époque avancée de l’année ? Bientôt la neige couvrira la terre et interrompra toute communication ; abandonner le jacal est nous exposer à mourir de faim.

– Oui, si nous restons dans le désert, fit le moine d’une voix insinuante.

– Où voulez-vous donc aller ? fit le squatter.

– Que sais-je, moi ? les villes ne manquent pas, je suppose, sur la frontière indienne ; à la rigueur, nous pourrions, il me semble, retourner au Paso del Norte ; là, au moins, nous avons des amis et nous sommes certains d’être bien reçus.

Le Cèdre-Rouge le regarda bien en face, et lui dit avec ironie :

– Voyons votre pensée tout entière, señor padre ; vous avez un but en voulant retourner au Paso, faites-le-moi connaître.

– Caspita ! vous êtes aussi instruit que moi, s’écria le moine en rougissant ; qu’avons-nous besoin de jouer au plus fin ?

Le squatter se leva brusquement et repoussa son siège d’un coup de pied.

– Vous avez raison, dit-il avec colère ; jouons cartes sur table, je ne demande pas mieux ; et pour vous donner l’exemple de la franchise, écoutez-moi. Vous n’avez jamais perdu de vue la raison qui vous a fait entrer dans le désert ; vous n’avez qu’un but, un désir, arriver au riche placer dont, en assassinant un homme, vous avez appris le gisement ; ni les fatigues que vous avez endurées, ni les périls que vous avez courus, n’ont pu vous faire renoncer à votre projet ; l’espoir de récolter de l’or vous aveugle et vous rend fou, est-ce vrai ?

– C’est vrai, répondit crûment le moine. Après ?

– Après, lorsque notre troupe a été détruite et complètement dispersée, voici le raisonnement que vous vous êtes fait, raisonnement, ajouta-t-il avec un sourire sardonique, qui fait honneur à votre sagacité et à la fermeté de votre caractère : le Cèdre-Rouge connaît à peu près le gisement du placer, il faut que je l’oblige à revenir avec moi au Paso, afin de reformer une autre troupe, parce que, si je le laisse seul dans la prairie, dès que je ne serai plus là, il se mettra à la recherche du trésor et il fera tant qu’il le découvrira. N’ai-je pas deviné juste, hein, dites-moi, compadre ?

– À peu près, répondit le moine, furieux de se voir si bien et si entièrement deviné.

– Oui, n’est-ce pas ? continua le Cèdre-Rouge. Seulement, comme toutes les natures mauvaises, gangrenées jusqu’au cœur, vous avez dépassé le but, en m’attribuant les mêmes instincts sordides qu’à vous, et vous avez pensé que si je suis assassin je puis être voleur ; voilà l’erreur dans laquelle vous êtes tombé, compadre. Sachez-le bien, fit-il en frappant du pied avec force, ce trésor tant convoité serait là, sous mon talon, que je ne me baisserais pas pour en ramasser une parcelle. L’or n’est rien pour moi, je le méprise. Lorsque j’ai consenti à vous guider vers le placer, vous avez naturellement supposé que c’était l’avarice qui m’engageait à le faire, vous vous êtes trompé ; j’avais un mobile plus puissant et surtout plus noble : la vengeance. Maintenant, tenez-vous-le pour dit et ne me reparlez plus de votre placer maudit, dont je me soucie comme d’une avellana (noisette). Sur ce, bonsoir, compadre ; je vais dormir ou du moins essayer, je vous conseille d’en faire autant.

Et sans attendre la réplique du moine, le squatter tourna le dos et se retira dans un des compartiments intérieurs.

Depuis quelque temps déjà, Ellen était allée se livrer au repos.

Fray Ambrosio demeura seul avec les fils du squatter.

Il y eut quelques minutes de silence entre eux.

– Bah ! dit enfin le moine avec insouciance, il a beau résister, il faudra bien qu’il y arrive.

Sutter hocha la tête d’un air de doute.

– Non, fit-il, vous ne connaissez pas le vieux ; quand il a dit non, c’est non.

– Hum ! ajouta Nathan, il est bien changé depuis quelque temps, il baisse beaucoup ; de son ancien caractère il ne semble avoir gardé que l’entêtement ; j’ai peur que vous échouiez, señor padre.

– Qui vivra verra ! dit gaiement celui-ci. Demain il fera jour ; en attendant, messieurs, suivons son conseil, allons dormir.

Dix minutes plus tard, tout dormait ou semblait dormir dans le jacal.

L’orage dura toute la nuit, faisant rage au dehors.

Au point du jour le squatter se leva et sortit, afin de se rendre compte du temps qu’il faisait.

La journée s’annonçait bien, le ciel était pur, le soleil se levait radieux ; le Cèdre-Rouge se disposa à se rendre au carral pour seller son cheval et ceux de ses compagnons.

Avant de quitter le seuil de la porte il jeta un regard circulaire aux environs.

Tout à coup il poussa une exclamation de surprise en se rejetant vivement en arrière.

Il avait aperçu un cavalier qui accourait à toute bride.

– Le père Séraphin ! murmura-t-il avec étonnement ; quelle raison assez grave peut l’amener à une pareille heure et l’obliger à faire une si grande diligence ?

En ce moment, le moine et ses fils entrèrent dans la salle commune.

Le squatter entendit le bruit de leurs pas derrière lui. Il se retourna vivement.

– Cachez-vous, cachez-vous ! dit-il d’une voix rauque.

– Qu’y a-t-il donc ? demanda le moine en s’avançant curieusement.

D’un coup de poing dans la poitrine, le squatter l’envoya rouler au milieu de la salle.

– Ne m’avez-vous pas entendu ? fit-il avec colère.

Mais quelque brusque qu’eût été le geste du Cèdre-Rouge, il ne l’avait pas été assez pour empêcher le moine de reconnaître l’arrivant.

– Ah ! ah ! fit-il avec un mauvais sourire, le père Séraphin ! Caspita ! si notre ami voulait se confesser, est-ce que je n’aurais pas suffi ? il n’avait qu’à me le dire, sans faire venir ce corbeau d’Europe.

Le Cèdre-Rouge se retourna comme si un serpent l’eût piqué ; il lança aux trois hommes un regard empreint d’une telle férocité que, malgré eux, instinctivement, ils reculèrent.

– Misérable ! s’écria-t-il d’une voix creuse et avec un geste terrible, je ne sais qui me retient de vous tuer comme un chien que vous êtes ! Au moindre mot que vous vous permettrez contre ce saint personnage, by God ! je vous écorcherai vif ! Cachez-vous, je le veux !

Subjugués par l’accent du squatter, les trois hommes sortirent de la salle sans répondre.

Dix minutes plus tard, le père Séraphin arrêtait son cheval et mettait pied à terre devant le jacal.

Le Cèdre-Rouge et sa fille vinrent le recevoir avec empressement.

Le père Séraphin entra dans la hutte en essuyant la sueur qui coulait sur son front. Le Cèdre-Rouge lui avança une butaque.

– Asseyez-vous, père, lui dit-il, vous êtes en nage ; voulez-vous vous rafraîchir ?

– Merci, répondit le missionnaire ; nous n’avons pas un instant à perdre, écoutez-moi.

– Que se passe-t-il donc, père ? pourquoi êtes-vous venu avec une si grande précipitation ?

– Hélas ! reprit-il, parce que vous êtes menacé d’un malheur terrible.

Le squatter devint pâle.

– C’est juste, murmura-t-il en fronçant les sourcils : l’expiation commence.

– Du courage, mes enfants ! dit affectueusement le missionnaire ; vos ennemis ont, je ne sais comment, découvert votre retraite ; demain, aujourd’hui peut-être, ils seront ici : il faut fuir, fuir au plus vite !

– À quoi bon ? murmura le squatter ; le doigt de Dieu est là dedans, nul ne peut éviter sa destinée ; mieux vaut rester, au contraire.

Le père Séraphin prit un air grave, et d’une voix sévère :

– Dieu, dit-il, veut vous éprouver sans doute, vous livrer à ceux qui vous cherchent pour vous tuer serait une lâcheté, un suicide ! le ciel ne vous le pardonnerait pas. Toute créature doit défendre sa vie quand on l’attaque ; fuyez, il le faut, je le veux, je vous l’ordonne !

Le squatter ne répondit pas.

– Du reste, reprit le père Séraphin avec un ton qu’il essaya de rendre gai, peut-être n’est-ce qu’une bourrasque ; vos ennemis ne vous trouvant pas ici, abandonneront sans doute votre poursuite ; dans quelques jours vous pourrez revenir.

– Non, dit le squatter avec découragement, c’est ma mort qu’ils veulent. Puisque vous m’ordonnez de fuir, mon père, je vous obéirai ; mais, avant tout, accordez-moi une grâce.

– Parlez, mon fils.

– Moi, reprit le squatter avec une émotion mal contenue, je suis un homme ; je puis, sans succomber, supporter les plus excessives fatigues, braver les plus grands dangers, mais…

– Je vous comprends, interrompit vivement le missionnaire ; j’avais l’intention de garder votre fille avec moi. Soyez tranquille, elle ne manquera de rien.

– Oh ! merci, merci, mon père ! s’écria-t-il avec un accent dont on aurait cru un tel homme incapable.

Ellen avait jusqu’alors assisté silencieuse à l’entretien ; elle fit un pas en avant, et, se plaçant entre les deux hommes, elle dit avec une majesté suprême :

– Je vous suis, au fond du cœur, reconnaissante à tous deux de vos intentions pour moi ; mais je ne puis abandonner mon père, je le suivrai partout où il ira, pour le consoler et l’aider à souffrir en chrétien les tribulations que Dieu lui envoie.

Les deux hommes firent un mouvement pour l’interrompre.

– Arrêtez ! continua-t-elle avec chaleur ; j’ai pu jusqu’à ce jour souffrir de la conduite de mon père, elle était coupable ; aujourd’hui le repentir est entré dans son âme, je le plains et je l’aime : ma résolution est immuable.

Le père Séraphin la regarda avec admiration.

– Bien, mon enfant, dit-il, Dieu vous tiendra compte de votre dévouement si pur et si noble.

Le squatter serrait sa fille dans ses bras sans avoir la force de prononcer une parole ; la joie inondait son âme : jamais il n’avait éprouvé une émotion si douce.

Le missionnaire se leva.

– Adieu, dit-il, bon courage ! Ayez confiance en Dieu, il ne vous abandonnera pas ; de loin je veillerai sur vous. Adieu, mes enfants, je vous bénis ! Partez ! partez sans retard !

Puis, s’arrachant avec effort des bras du Cèdre-Rouge et de sa fille, le père Séraphin remonta à cheval, enfonça les éperons dans les flancs de sa monture et s’éloigna à toute bride, après avoir fait à ses protégés un dernier signe de la main.

– Oh ! murmura le Cèdre-Rouge, cela ne pouvait pas durer, j’étais presque heureux.

– Courage, mon père ! lui dit doucement Ellen.

Ils rentrèrent dans le jacal.

Fray Ambrosio, Nathan et Sutter attendaient dans la salle.

– Allez seller les chevaux, dit le squatter ; nous partons.

– Hein ! fit le moine à l’oreille de Sutter. Quand je vous disais que le diable était pour nous, canarios ! il ne pouvait pas nous oublier, nous avons assez fait pour lui.

Les préparatifs de l’abandon du jacal ne furent pas longs à faire : une heure plus tard les cinq personnages s’éloignaient.

– De quel côté nous dirigeons-nous ? demanda le moine.

– Gagnons les montagnes, répondit laconiquement le squatter en jetant un triste et mélancolique regard sur cette misérable hutte dans laquelle il avait peut-être espéré mourir et que le destin l’obligeait à quitter pour toujours.

À peine les fugitifs disparaissaient-ils à quelque distance derrière un fourré d’arbres, qu’un tourbillon de poussière s’éleva à l’horizon, et bientôt cinq cavaliers apparurent accourant à fond de train.

Ces cinq cavaliers étaient Valentin et ses amis.

Il paraît que le chasseur avait obtenu du Blood’s Son des renseignements positifs sur la situation du jacal ; il n’hésita pas un instant et marcha droit à la hutte.

Le cœur de don Pablo battait à briser sa poitrine, bien qu’il semblât impassible.

– Hum ! fit Valentin lorsqu’il se trouva à une dizaine de pas du jacal, tout est bien silencieux ici.

– Le squatter est à la chasse sans doute, observa don Miguel : nous ne trouverons que sa fille.

Valentin se mit à rire.

– Vous croyez ! fit-il ; non, non, don Miguel ; souvenez-vous des paroles du père Séraphin.

Le général Ibañez, arrivé le premier devant le jacal, mit pied à terre et ouvrit la porte.

– Personne ! dit-il avec étonnement.

– Pardieu ! fit Valentin, je me doutais bien que les oiseaux seraient dénichés ; mais cette fois ils seront bien fins s’ils nous échappent. En route, en route ! ils ne peuvent être loin.

Ils repartirent.

Curumilla resta un instant en arrière et jeta une torche enflammée dans la hutte, qui bientôt prit feu et brûla comme un phare.

– Le terrier est enfumé, murmura l’Indien tout en rejoignant ses compagnons.

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