IV

Tout à l’heure je viens d’entendre

Dehors résonner doucement

D’un air monotone et si tendre

Qu’il bruit en moi vaguement,

Une de ces vielles plaintives,

Muses des pauvres Auvergnats,

Qui jadis aux heures oisives

Nous charmaient si souvent, hélas !

Et, son espérance détruite,

Le pauvre s’en fut tristement ;

Et moi je pensai tout de suite

À mon ami que j’aime tant,

Qui me disait en promenade

Que pour lui c’était un plaisir

Qu’une semblable sérénade

Dans un morne et long loisir.

Nous aimions cette humble musique

Si douce à nos esprits lassés

Quand elle vient, mélancolique,

Répondre à de tristes pensers.

– Et j’ai laissé les vitres closes,

Ingrat, pour qui m’a fait ainsi

Rêver de si charmantes choses,

Et penser à mon cher Henri !

V

Hélas ! qui n’a gémi sur autrui, sur soi-même ?

Et qui n’a dit à Dieu : « Pardonnez-moi, Seigneur,

Si personne ne m’aime et si nul n’a mon cœur ?

Ils m’ont tous corrompu ; personne ne vous aime ! »

Alors lassé du monde et de ses vains discours,

Il faut lever les yeux aux voûtes sans nuages,

Et ne plus s’adresser qu’aux muettes images,

De ceux qui n’aiment rien consolantes amours.

Alors il faut s’entourer de mystère,

Se fermer aux regards, et sans morgue et sans fiel,

Sans dire à vos voisins : « Je n’aime que le ciel, »

Dire à Dieu : « Consolez mon âme de la terre ! »

Tel, fermé par son prêtre, un pieux monument,

Quand sur nos sombres toits la nuit est descendue,

Quand la foule a laissé le pavé de la rue,

Se remplit de silence et de recueillement.

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