CCXXXVIII

LARGE est la plaine et le pays au loin se découvre. Les heaumes aux pierreries serties d'or brillent, et les écus et les brognes safrées et les épieux et les enseignes fixées aux fers. Les clairons retentissent, et leurs voix sont très claires, et hautes sont les tenues de l'olifant. L'émir appelle son frère, Canabeu, le roi de Floredée : celui-là tenait la terre jusqu'à la Val Sevrée. Il lui montre les corps de bataille de Charles : « Voyez l'orgueil de France la louée ! L'empereur chevauche très fièrement. Il est en arrière avec ces vieux qui sur leurs brognes ont jeté leurs barbes, aussi blanches que neige sur glace. Ceux-là frapperont bien des épées et des lances. Nous aurons une bataille dure et acharnée ; jamais nul n'aura vu la pareille. » Loin en avant de sa troupe, plus loin qu'on lancerait une verge pelée, Baligant chevauche. Il s'écrie : « Venez, païens, car je me mets en route. » Il brandit son épieu ; il en a tourné la pointe contre Charles.

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