IV.

Voltaire, en attaquant le christianisme, connaissait trop bien les hommes pour ne pas chercher à s’emparer de cette opinion qu’on appelle l’opinion du monde ; aussi employa-t-il tous ses talents à faire une espèce de bon ton de l’impiété. Il y réussit en rendant la religion ridicule aux yeux des gens frivoles. C’est ce ridicule que l’auteur du Génie du Christianisme a cherché à effacer ; c’est le but de tout son travail, le but qu’il ne faut jamais perdre de vue si l’on veut juger son ouvrage avec impartialité. Mais l’auteur l’a-t-il effacé, ce ridicule ? Ce n’est pas là la question. Il faut demander : A-t-il fait tous ses efforts pour l’effacer ? Sachez-lui gré de ce qu’il a entrepris, non de ce qu’il a exécuté. Permitte divis caetera. Il ne défend rien de son livre, hors l’idée qui en fait la base. Considérer le christianisme dans ses rapports avec les sociétés humaines ; montrer quel changement il a apporté dans la raison et les passions de l’homme, comment il a civilisé les peuples gothiques, comment il a modifié le génie des arts et des lettres, comment il a dirigé l’esprit et les mœurs des nations modernes, en un mot, découvrir tout ce que cette religion a de merveilleux dans ses relations poétiques, morales, politiques, historiques, etc., cela semblera toujours à l’auteur un des plus beaux sujets d’ouvrage que l’on puisse imaginer. Quant à la manière dont il a exécuté son ouvrage, il l’abandonne à la critique.

Share on Twitter Share on Facebook