Scène III

Floridan

Quel bonheur m’accompagne en ce moment fatal !

Le tonnerre a sous moi foudroyé mon cheval,

Et consumant sur lui toute sa violence,

Il m’a porté respect parmi son insolence.

Tous mes gens, écartés par un subit effroi,

Loin d’être à mon secours, ont fui d’autour de moi,

Ou, déjà dispersés par l’ardeur de la chasse,

Ont dérobé leur tête à sa fière menace.

Cependant seul, à pied, je pense à tous moments

Voir le dernier débris de tous les éléments,

Dont l’obstination à se faire la guerre

Met toute la nature au pouvoir du tonnerre.

Dieux, si vous témoignez par là votre courroux,

De Clitandre ou de moi lequel menacez-vous ?

La perte m’est égale, et la même tempête

Qui l’aurait accablé tomberait sur ma tête.

Pour le moins, justes dieux, s’il court quelque danger,

Souffrez que je le puisse avec lui partager !

J’en découvre à la fin quelque meilleur présage ;

L’haleine manque aux vents, et la force à l’orage ;

Les éclairs, indignés d’être éteints par les eaux,

En ont tari la source et séché les ruisseaux,

Et déjà le soleil de ses rayons essuie

Sur ces moites rameaux le reste de la pluie ;

Au lieu du bruit affreux des foudres décochés,

Les petits oisillons, encor demi-cachés…

Mais je verrai bientôt quelques-uns de ma suite :

Je le juge à ce bruit.

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