Scène II

Pleirante, Célidée

Pleirante
Ne pense plus, ma fille, à me cacher ta flamme ;

N’en conçois point de honte, et n’en crains point de blâme :

Le sujet qui l’allume a des perfections

Dignes de posséder tes inclinations ;

Et pour mieux te montrer le fond de mon courage,

J’aime autant son esprit que tu fais son visage.

Confesse donc, ma fille, et crois qu’un si beau feu

Veut être mieux traité que par un désaveu.

Célidée
Monsieur, il est tout vrai, son ardeur légitime

A tant gagné sur moi que j’en fais de l’estime ;

J’honore son mérite, et n’ai pu m’empêcher

De prendre du plaisir à m’en voir rechercher ;

J’aime son entretien, je chéris sa présence :

Mais cela n’est enfin qu’un peu de complaisance,

Qu’un mouvement léger qui passe en moins d’un jour.

Vos seuls commandements produiront mon amour ;

Et votre volonté, de la mienne suivie…

Pleirante
Favorisant ses vœux, seconde ton envie.

Aime, aime ton Lysandre ; et puisque je consens

Et que je t’autorise à ces feux innocents,

Donne-lui hardiment une entière assurance

Qu’un mariage heureux suivra son espérance ;

Engage-lui ta foi. Mais j’aperçois venir

Quelqu’un qui de sa part te vient entretenir.

Ma fille, adieu : les yeux d’un homme de mon âge

Peut-être empêcheraient la moitié du message.

Célidée
Il ne vient rien de lui qu’il faille vous celer.

Pleirante
Mais tu seras sans moi plus libre à lui parler ;

Et ta civilité, sans doute un peu forcée,

Me fait un compliment qui trahit ta pensée.

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