Pleirante, Célidée
Pleirante
Ne pense plus, ma fille, à me cacher ta flamme ;
N’en conçois point de honte, et n’en crains point de blâme :
Le sujet qui l’allume a des perfections
Dignes de posséder tes inclinations ;
Et pour mieux te montrer le fond de mon courage,
J’aime autant son esprit que tu fais son visage.
Confesse donc, ma fille, et crois qu’un si beau feu
Veut être mieux traité que par un désaveu.
Célidée
Monsieur, il est tout vrai, son ardeur légitime
A tant gagné sur moi que j’en fais de l’estime ;
J’honore son mérite, et n’ai pu m’empêcher
De prendre du plaisir à m’en voir rechercher ;
J’aime son entretien, je chéris sa présence :
Mais cela n’est enfin qu’un peu de complaisance,
Qu’un mouvement léger qui passe en moins d’un jour.
Vos seuls commandements produiront mon amour ;
Et votre volonté, de la mienne suivie…
Pleirante
Favorisant ses vœux, seconde ton envie.
Aime, aime ton Lysandre ; et puisque je consens
Et que je t’autorise à ces feux innocents,
Donne-lui hardiment une entière assurance
Qu’un mariage heureux suivra son espérance ;
Engage-lui ta foi. Mais j’aperçois venir
Quelqu’un qui de sa part te vient entretenir.
Ma fille, adieu : les yeux d’un homme de mon âge
Peut-être empêcheraient la moitié du message.
Célidée
Il ne vient rien de lui qu’il faille vous celer.
Pleirante
Mais tu seras sans moi plus libre à lui parler ;
Et ta civilité, sans doute un peu forcée,
Me fait un compliment qui trahit ta pensée.