Scène VII

Dorimant, Lysandre, Célidée, Hippolyte

Dorimant

Ainsi, loin de m’aider, tu traversais ma flamme !

Lysandre

Les efforts que Pleirante à ma prière a faits

T’auraient acquis déjà le but de tes souhaits ;

Mais tu dois accuser les glaces d’Hippolyte,

Si ton bonheur n’est pas égal à ton mérite.

Hippolyte

Qu’aurai-je cependant pour satisfaction

D’avoir servi d’objet à votre fiction ?

Dans votre différend je suis la plus blessée,

Et me trouve, à l’accord, entièrement laissée.

Célidée

N’y songe plus, de grâce, et pour l’amour de moi,

Trouve bon qu’il ait feint de vivre sous ta loi.

Veux-tu le quereller lorsque je lui pardonne ?

Le droit de l’amitié tout autrement ordonne.

Tout prêts d’être assemblés d’un lien conjugal,

Tu ne peux le haïr sans me vouloir du mal.

J’ai feint par ton conseil ; lui, par celui d’un autre ;

Et bien qu’amour jamais ne fût égal au nôtre,

Je m’étonne comment cette confusion

Laisse finir si tôt notre division.

Hippolyte

De sorte qu’à présent le ciel y remédie ?

Célidée

Tu vois ; mais après tout, s’il faut que je le die,

Ton conseil est fort bon, mais un peu dangereux.

Hippolyte

Excuse, chère amie, un esprit amoureux.

Lysandre me plaisait, et tout mon artifice

N’allait qu’à détourner son cœur de ton service.

J’ai fait ce que j’ai pu pour brouiller vos esprits ;

J’ai, pour me l’attirer, pratiqué tes mépris ;

Mais puisqu’ainsi le ciel rejoint votre hyménée…

Dorimant

Votre rigueur vers moi doit être terminée.

Sans chercher de raisons pour vous persuader,

Votre amour hors d’espoir fait qu’il me faut céder ;

Vous savez trop à quoi la parole vous lie.

Hippolyte

À vous dire le vrai, j’ai fait une folie :

Je les croyais encor loin de se réunir,

Et moi, par conséquent, loin de vous la tenir.

Dorimant

Auriez-vous pour la rompre une âme assez légère ?

Hippolyte

Puisque je l’ai promis, vous pouvez voir ma mère.

Lysandre

Si tu juges Pleirante à cela suffisant,

Je crois qu’eux deux ensemble en parlent à présent.

Dorimant

Après cette faveur qu’on me vient de promettre,

Je crois que mes devoirs ne se peuvent remettre :

J’espère tout de lui ; mais, pour un bien si doux

Je ne saurais…

Lysandre

Arrête ; ils s’avancent vers nous.

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