Scène IV

Chrysante, Philiste, Doris

Chrysante
Je ne le puis celer, bien que j’y compatisse :

Je trouve en ton malheur quelque peu de justice :

Le ciel venge ta sœur ; ton fol emportement

A rompu sa fortune, et chassé son amant,

Et tu vois aussitôt la tienne renversée,

Ta maîtresse par force en d’autres mains passée.

Cependant Alcidon, que tu crois rappeler,

Toujours de plus en plus s’obstine à quereller.

Philiste
Madame, c’est à vous que nous devons nous prendre

De tous les déplaisirs qu’il nous en faut attendre.

D’un si honteux affront le cuisant souvenir

Éteint toute autre ardeur que celle de punir.

Ainsi mon mauvais sort m’a bien ôté Clarice ;

Mais du reste accusez votre seule avarice.

Madame, nous perdons par votre aveuglement

Votre fils, un ami ; votre fille, un amant.

Doris
Ôtez ce nom d’amant : le fard de son langage

Ne m’empêcha jamais de voir dans son courage ;

Et nous étions tous deux semblables en ce point,

Que nous feignions d’aimer ce que nous n’aimions point.

Philiste
Ce que vous n’aimiez point ! Jeune dissimulée,

Fallait-il donc souffrir d’en être cajolée ?

Doris
Il le fallait souffrir, ou vous désobliger.

Philiste
Dites qu’il vous fallait un esprit moins léger.

Chrysante
Célidan vient d’entrer : fais un peu de silence,

Et du moins à ses yeux cache ta violence.

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