Scène première

Philandre

Tu l’as gagné, Mélite ; il ne m’est pas possible

D’être à tant de faveurs plus longtemps insensible.

Tes lettres où sans fard tu dépeins ton esprit,

Tes lettres où ton cœur est si bien par écrit,

Ont charmé tous mes sens par leurs douces promesses.

Leur attente vaut mieux, Chloris, que tes caresses.

Ah ! Mélite, pardon ! je t’offense à nommer

Celle qui m’empêcha si longtemps de t’aimer.

Souvenirs importuns d’une amante laissée,

Qui venez malgré moi remettre en ma pensée

Un portrait que j’en veux tellement effacer

Que le sommeil ait peine à me le retracer,

Hâtez-vous de sortir sans plus troubler ma joie ;

Et retournant trouver celle qui vous envoie,

Dites-lui de ma part pour la dernière fois

Qu’elle est en liberté de faire un autre choix ;

Que ma fidélité n’entretient plus ma flamme,

Ou que s’il m’en demeure encore un peu dans l’âme,

Je souhaite, en faveur de ce reste de foi,

Qu’elle puisse gagner au change autant que moi.

Dites-lui que Mélite, ainsi qu’une déesse,

Est de tous nos désirs souveraine maîtresse,

Dispose de nos cœurs, force nos volontés,

Et que par son pouvoir nos destins surmontés

Se tiennent trop heureux de prendre l’ordre d’elle ;

Enfin que tous mes vœux…

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