DÉCEMBRE

Le 10. – Je commençais alors à regarder ma grotte ou ma voûte comme terminée, lorsque tout-à-coup, – sans doute je l’avais faite trop vaste, – une grande quantité de terre éboula du haut de l’un des côtés ; j’en fus, en un mot, très-épouvanté, et non pas sans raison ; car, si je m’étais trouvé dessous, je n’aurais jamais eu besoin d’un fossoyeur. Pour réparer cet accident j’eus énormément de besogne ; il fallut emporter la terre qui s’était détachée ; et, ce qui était encore plus important, il fallut étançonner la voûte, afin que je pusse être bien sûr qu’il ne s’écroulerait plus rien.

Le 11. – Conséquemment je travaillai à cela, et je plaçai deux étaies ou poteaux posés à plomb sous le ciel de la grotte, avec deux morceaux de planche mis en croix sur chacun. Je terminai cet ouvrage le lendemain ; puis, ajoutant encore des étaies garnies de couches, au bout d’une semaine environ j’eus mon plafond assuré ; et, comme ces poteaux étaient placés en rang, ils me servirent de cloisons pour distribuer mon logis.

Le 17. – À partir de ce jour jusqu’au vingtième, je posai des tablettes et je fichai des clous sur les poteaux pour suspendre tout ce qui pouvait s’accrocher ; je commençai, dès lors, à avoir mon intérieur en assez bon ordre.

Le 20. – Je portai tout mon bataclan dans ma grotte ; je me mis à meubler ma maison, et j’assemblai quelques bouts de planche en manière de table de cuisine, pour apprêter mes viandes dessus ; mais les planches commençaient à devenir fort rares par-devers moi ; aussi ne fis-je plus aucune autre table.

Le 24. – Beaucoup de pluie toute la nuit et tout le jour ; je ne sortis pas.

Le 25. – Pluie toute la journée.

Le 26. – Point de pluie ; la terre était alors plus fraîche qu’auparavant et plus agréable.

Le 27. – Je tuai un chevreau et j’en estropiai un autre qu’alors je pus attraper et amener en laisse à la maison. Dès que je fus arrivé je liai avec des éclisses l’une de ses jambes qui était cassée.

Nota. J’en pris un tel soin, qu’il survécut, et que sa jambe redevint aussi forte que jamais ; et, comme je le soignai ainsi fort long-temps, il s’apprivoisa et paissait sur la pelouse, devant ma porte, sans chercher aucunement à s’enfuir. Ce fut la première fois que je conçus la pensée de nourrir des animaux privés, pour me fournir d’aliments quand toute ma poudre et tout mon plomb seraient consommés.

Les 28, 29 et 30, – Grandes chaleurs et pas de brise ; si bien qu’il ne m’était possible de sortir que sur le soir pour chercher ma subsistance. Je passai ce temps à mettre touts mes effets en ordre dans mon habitation.

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