Prélude Scène 2 : L'origine de la guerre

Il y a des centaines et des centaines d'années, 3 500 ans peut-être, il y avait une fière cité commerçante qui s'appelait Ilion ou Troie.

Or, de l'autre côté de la mer Égée, sur la partie du continent que nous appelons la Grèce, et dans de nombreuses îles disséminées sur la mer, il y avait d'autres villes et bourgades dont les hommes faisaient aussi du commerce par mer. Il existait une rivalité entre ces villes et Troie depuis bien des années. Cette rivalité aboutit à une guerre longue et terrible. Voici, selon les légendes, quelle fut l'origine de la guerre.

Le roi de Troie, Priam, et sa femme Hécube avaient beaucoup de fils et de filles. Mais quand l'un de ces enfants fut sur le point de naître, la reine eut un songe : elle rêva que, devenu grand, il serait une torche enflammée et détruirait la cité. En ce temps-là, on croyait fortement aux songes ; aussi, quand un beau petit garçon leur arriva, le père et la mère affligés décidèrent de l'abandonner sur les pentes de l'Ida, une montagne voisine, afin de sauver, par sa mort, la ville qu'ils aimaient.

Ils confièrent la triste tâche à un berger. Mais, le berger était un homme bon qui, n'ayant pas d'enfants, garda le bébé et l'éleva comme le sien.

L'enfant s'appelait Pâris, et il devint un jeune berger beau et fort, qui ne se doutait pas du tout qu'il était fils de roi. Mais le destin, pensait-on alors, était quelque chose à quoi l'on ne pouvait pas échapper. C'est ainsi que le jeune Pâris trouva enfin son destin.

Sur le Mont Olympe où les dieux immortels décidaient souvent du destin des hommes, trois déesses se querellèrent un jour. C'étaient Héra, la reine des dieux, Athéna, déesse de la sagesse, et Aphrodite, déesse de la beauté. Elles se querellaient sur le point de savoir laquelle d'entre elles était la plus belle, et elles décidèrent de s'en remettre au choix d'un homme mortel.

Les trois déesses descendirent sur les pentes du Mont Ida et là, qui trouvèrent-elles, sinon Pâris, qui gardait tranquillement ses troupeaux ? Les déesses lui demandèrent de choisir entre elles ; puis, si peu honnête que cela nous paraisse, elles commencèrent à lui offrir des présents. Héra lui offrit le plus grand des pouvoirs sur les armées et les hommes, s'il la choisissait, elle ; Athéna lui offrit l'intelligence ; mais Aphrodite lui offrit comme épouse la plus belle femme du monde, s'il la choisissait, et c'est ce qu'il fit.

Dès lors Pâris ne se contenta plus de sa vie tranquille sur la montagne. Il descendit dans la ville de Troie pour chercher la fortune que la déesse lui avait promise. Là, le charme de son visage et de ses manières, son habileté aux jeux l'amenèrent bientôt à la cour du roi. Il ne fallut pas longtemps pour que son histoire fût connue, et ses heureux parents, bannissant leurs craintes, fêtèrent le retour du fils qu'ils avaient perdu depuis longtemps. Bientôt Pâris s'en fut, avec une flotte à lui, pour faire du commerce et voir du pays.

C'est alors que les difficultés commencèrent. Pâris n'avait pas oublié la promesse que la déesse lui avait faite, et, partout où il allait, il cherchait la belle femme que la déesse lui avait promise.

Il entendit bientôt parler d'une femme qui était réputée au loin comme la plus belle femme du monde. C'était Hélène de Sparte. Il se rendit donc à Sparte et s'aperçut que cette renommée était exacte. Pâris s'éprit aussitôt d'Hélène, et, quand il rembarqua, il l'emmena avec lui à Troie pour en faire son épouse.

Tout cela aurait été fort beau si Hélène n'avait été déjà mariée. Son mari était le roi de Sparte, Ménélas. Et il fut irrité, comme vous pouvez l'imaginer, quand sa femme le quitta pour Troie.

Ménélas se rendit immédiatement chez son frère Agamemnon, roi de Mycènes. Ensemble les deux hommes firent des projets de revanche. Ils allèrent d'île en île, de ville en ville, pour lever une armée et équiper une flotte, afin de reconquérir Hélène et de châtier Troie.

Ils débarquèrent enfin sur le rivage troyen. Puis ils bâtirent tout le long du rivage un grand mur de terre, en avant de leurs vaisseaux. À l'abri de ce mur, près des vaisseaux aux hautes proues, ils construisirent des baraques. Et ces baraques devaient être leurs maisons pendant dix longues et pénibles années de guerre.

À tour de rôle, les deux armées remportèrent des victoires au cours de ces années-là. Mais les Troyens ne purent jamais incendier les vaisseaux grecs, ni les forcer à reprendre la mer. Et les Grecs ne purent jamais faire une percée dans les murs de la ville pour reprendre Hélène aux Troyens.

C'est à la fin de la neuvième année de guerre que commence le récit d'Homère.

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