À Victor Pavie.

20 mai 1827.

Vous êtes bien heureusement né, monsieur. Vous avez un talent fait pour honorer votre famille et une famille faite pour comprendre votre talent. J’ai vu votre excellent père, et je ne saurais vous dire à quel point je l’ai aimé dès le premier jour. Il a quelque chose de si bon, de si cordial, de si bienveillant, que je ne pourrais souhaiter un autre protecteur aux premières années d’un talent précieux comme le vôtre. Bénissez Dieu tous les deux, il ne pouvait donner un meilleur fils à un meilleur père.

Votre père nous a quittés vite, trop vite, dites-le-lui bien. Mais aux regrets que nous a causés son départ il a voulu mêler une espérance, celle de vous voir bientôt. Votre aimable lettre la change en certitude, et la plus chère marque d’amitié que vous puissiez me donner, c’est de la réaliser bientôt. Vous ferez de belles choses partout, mais à Paris l’esprit a plus d’aliment : les musées, les galeries, les bibliothèques lui ouvrent de nouvelles sphères d’idées ; enfin, tout ce qui s’acquiert est ici, et vous avez déjà tout ce que la nature donne. Votre ami, M. Mazure, a été assez bon pour me venir voir deux fois, et m’a communiqué de fort beaux vers, auxquels il ne manque qu’un éditeur. Le moment est malheureusement peu propice pour qu’un éditeur s’éprenne d’un manuscrit dont l’auteur est inconnu ; mais j’espère être plus utile cet automne à M. Mazure ; je ne me plains que de le voir trop rarement ; il doit penser qu’un poëte qui est de vos amis ne peut jamais me déranger. J’ai été également enchanté de connaître M. David [d’Angers]. C’est un homme de beaucoup de talent et de beaucoup d’idées. Il m’a fait voir son atelier, où abondent les belles choses. Je viens de recevoir l’Inauguration du buste de Béclard. Je l’ai lue avec beaucoup d’intérêt. Le discours de M. votre père est surtout remarquable.

Vous n’avez plus besoin maintenant que je vous dise de m’écrire. Vous savez que je vous aime. Dites à votre bon père que le plus sûr moyen de doubler le plaisir que me fera votre arrivée à Paris, c’est de venir avec vous.

Votre ami,

V. H.

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