À Don Wenceslas Ayguals de Izco.

Monsieur,

J’ai lu vos nobles vers, j’ai lu les nobles paroles qui les précèdent et que vous voulez bien m’adresser.

Je vous remercie, je vous applaudis, je vous estime.

Courage ! Vous êtes un digne espagnol, ce qui est beaucoup ; et vous êtes un digne citoyen, ce qui est plus encore.

Si quelque chose passe avant la patrie, c’est la liberté.

Le double amour de la liberté et de la patrie est dans votre éloquent poëme, cette double inspiration, c’est toute votre âme.

Vous flétrissez généreusement les actes odieux de la Force ; vous proclamez énergiquement les Droits augustes de la vie humaine.

Élevez la voix, ne vous découragez pas, la Force vraie est en vous, c’est la pensée.

Les hommes de la tyrannie ne sont rien devant les hommes de l’idéal.

L’idéal, tel est le but du progrès, tel est le faîte de la civilisation.

J’aime profondément l’Espagne, je suis presque un de ses fils, et c’est une joie pour moi de la voir, cette grande et illustre Espagne, conduite par des nobles esprits tels que vous, marcher de plus en plus vers la lumière.

Élimination et formation ; c’est la loi du monde.

Sous les tyrannies qui s’éliminent, l’Europe se forme.

Soyons européens.

C’est le commencement de la fraternité universelle.

Poëte, philosophe, homme ! Je suis avec vous.

Votre Droit vous donne une fonction, votre talent vous donne une mission.

Marchez, vous vaincrez.

Victor Hugo.

Hauteville-House, le 20 avril 1866.

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