à Edgar Quinet.

Hauteville-House, 26 février 1870.

Mon cher Quinet, vous venez de faire votre plus grand livre. La vieillesse est l’âge du total pour les pensées comme pour les années, pour l’esprit comme pour la vie. Ce mystérieux rajeunissement dont, comme vous, j’ai conscience, ce doublement des forces intellectuelles et morales quand la force matérielle s’éteint, cette croissance dans le déclin, quelle magnifique preuve de l’âme ! L’esprit voit la tombe et sent le printemps. Il crée jusqu’à la dernière minute, sublime annonce de la grande vie inconnue où il va entrer par la mort. Je sens tout cela, et je vous l’écris. Jamais vous n’avez été plus puissant, plus profond et plus vivant que dans ce dernier livre. L’ordonnance est magnifique, la conception est haute, le style est robuste et charmant. Je vous envoie mon tendre et cordial applaudissement. Vous touchez à trop de choses pour que nous soyons d’accord sur tout ; mais qu’importe ! Votre livre est grand. Je vous serre la main, mon ami. Victor Hugo.

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