À François-Victor.

H.-H., 14 mai.

Mon Victor, je veux, comme à Charles, t’envoyer mon cri de joie. Ton premier article est ravissant de force, de hauteur et d’esprit, l’assimilation des époques est admirablement réussie, et tu peins 1869 sous le pseudonyme de 1789 avec une si parfaite exactitude que Ruy Blas lui-même s’y trouve. — L’étrangère, l’innocent qui serait peut-être devenu un monstre, tout cela est surprenant de bonheur et de vigueur. Donc je t’embrasse.

Rassurez-vous du reste, Charles et toi — je ne vais pas me mettre à vous écrire comme cela, en papa très bien, à tous vos articles. Mais je vous envoie d’avance un tas d’applaudissements en blanc.

Je suis ravi de la profession de foi de notre cher Rochefort. Ses chroniques du Rappel ont toutes les qualités robustes et charmantes de la Lanterne. Quoi qu’en disent tous ses envieux, jamais il n’a eu plus de verve et d’éloquence. Il a grandi dans l’exil.

J’espère beaucoup. S’il n’était pas nommé, ce serait une honte pour Paris. Se rappelle-t-il que je lui ai prédit toutes les trahisons qui s’accomplissent en ce moment ? J’ai une telle habitude, depuis quarante ans, d’être trahi ! Dis à Rochefort que je l’aime profondément. Il va te répondre : parbleu ! je le sais bien ! c’est égal, rabâche-le lui.

Maintenant une commission :

Lis la lettre à Barbès que voici, mets-la sous enveloppe, et envoie-la lui tout de suite par la plus prochaine poste. En même temps va trouver M. Lequeux, et dis-lui de ma part d’envoyer immédiatement l’Homme qui Rit à Barbes avec le frontispice que voici, signé de moi.

Je vous serre tous dans mes bras.

V.

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