À Jules Claretie, aux bureaux de l’Opinion nationale.

H.-H., 14 janvier.

Vous avez raison, mon éloquent et loyal confrère, votre réclamation, arrivée à temps, eût fait reculer le Théâtre-Français, et maintenu Hernani sur l’affiche. Aujourd’hui le théâtre, ayant honte bue, fera la sourde oreille. Mais le public, non. Vous prenez acte hautement de la lâcheté commise, du dol et du vol, de cette petite turpitude jésuite étranglant Hierro entre deux portes. Qui est maître aujourd’hui dans la maison de Molière ? c’est Tartufe. Il s’appelle Édouard Thierry, a fait ses Pâques entre deux portants, recevant de Dupanloup l’hostie, et de Rouher le mot d’ordre. Je vous remercie de flétrir ça, et je suis certain que, puissant comme vous l’êtes par la conviction et le talent, vous continuerez. Je vous ai écrit sur votre beau livre les Derniers Montagnards. Avez-vous reçu ma lettre ? Je vous ai fait des envois. Vous sont-ils arrivés ? Vous en trouverez encore un dans cette lettre, au verso ci-joint, si le cabinet noir n’intervient pas. Je suis un pestiféré, je suis en quarantaine, la police crible mes lettres, la poste vole l’argent de mes timbres-poste, depuis deux mois j’ai dépensé deux cents francs en stamps, et il n’est pas arrivé de mes messages à mes amis pour dix francs ! Telle est l’honnêteté du gouvernement dit impérial. C’est égal, je vous aime de tout mon cœur.

Victor Hugo.

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