à Paul Meurice. Bruxelles, 1 er septembre.

On me dit de ne pas m’user, de me garder pour un moment suprême ; mais ce moment suprême viendra-t-il ? Votre belle et douce lettre m’arrive et m’émeut jusqu’à l’attendrissement. Vous terminez par une question. Je ne puis confier ma réponse à la poste, mais Jules Claretie vous la portera de vive voix. Il est ici depuis hier, il a déjeuné et dîné avec moi ; en rentrant à Paris il vous dira ce que j’ai dit. J’aime, et vous aimez aussi ce jeune esprit où il y a tant de cœur. Il vous répétera mes paroles. Vous verrez à quel point je suis prêt, mais je ne veux aller à Paris que pour un seul cas et pour une seule œuvre, héroïque celle-là. Paris appelant la révolution au secours. alors j’arrive. — sinon, je reste. Certes, j’ai foi au résultat final. Je n’ai jamais cru à la France plus qu’en ce moment. Elle fera son œuvre, la république continentale, puis s’y dissoudra. Il ne peut sortir de cette guerre que la fin des guerres, et de cet affreux choc des monarchies que les états-Unis d’Europe. Vous les verrez. Je ne les verrai pas. Pourquoi ? C’est parce que je les ai prédits. J’ai, le premier, le 17 juillet 1851, prononcé (au milieu des huées) ce mot : les états-Unis d’Europe. donc, j’en serai exclu. Jamais les Moïses ne virent les Chanaans. Tre lettre m 4 a fait venir les larmes aux yeux. Comme vous m’aimez ! Et comme je vous aime ! Oui, je crois comme vous que la réapparition du rappel eût été utile. En ce moment-ci, être démocrate c’est être patriote. Défendre Paris, c’est défendre le monde. homo sum, donc je défends Paris. Que je voudrais vous voir ! Charles, Claretie et Frédérix partent en ce moment pour Virton. On se bat tout près de là, à Carignan. Ils vont voir, de la bataille, ce qu’ils pourront.

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