En 1869, à Guernesey, Victor Hugo, comme s’il pressentait son prochain retour en France, mit en ordre ses manuscrits et les fit relier en parchemin, simplement et solidement. Le manuscrit de Notre-Dame de Paris porte son titre inscrit au dos et sur le plat de la reliure en lettres rouges.
Le manuscrit se compose de 398 feuillets de papier de fil. La pagination est indiquée, au recto seulement, par trois chiffres, deux au crayon, le troisième à l’encre rouge ; nous suivrons ce dernier, plus régulier que les autres. Les feuillets mesurent 35 centimètres de haut sur 22 de large. Chaque page, pliée en deux, laisse la marge de la même grandeur que le texte.
Il n’y a pas lieu de décrire la page du titre, qui est reproduite en fac-similé au commencement de ce volume. Répétons seulement les deux notes qui s’y trouvent, écrites à l’encre rouge :
J’ai écrit les trois ou quatre premières pages de Notre-Dame de Paris le 25 juillet 1830. La révolution de juillet m’interrompit. Puis ma chère petite Adèle vint au monde. (Qu’elle soit bénie !) Je me remis à écrire Notre-Dame de Paris le 1er septembre, et l’ouvrage fut terminé le 15 janvier 1831.
Comme plusieurs de mes ouvrages, Notre-Dame de Paris a été imprimée sur le manuscrit. Les noms qu’on voit sur les marges sont les noms des compositeurs auxquels on distribuait la copie.
Conservons à la postérité les noms de ces compositeurs : Charles, Lévi, Rousseau, Michel, Tisserand, Eugène, Constant, et enfin Bossu, que Quasimodo devait rendre rêveur.
Sur le manuscrit, soit en marge, soit entre deux alinéas, Victor Hugo a noté à plusieurs endroits la date à laquelle il écrivait. On peut suivre ainsi les progrès de son travail, et il nous a semblé intéressant de relever ces différentes dates, en indiquant les passages où elles se trouvent. Nous mentionnerons également les quelques modifications de titres de chapitres, les additions marginales, des réflexions, des mémento, des adresses, etc.
Victor Hugo, en travaillant, jetait parfois, d’une plume distraite, à la marge du manuscrit, de petits croquis ayant trait le plus souvent aux lignes qu’il écrivait ; nous reproduisons ces griffonnages, quelque peu élémentaires, mais amusants.
Feuillet 3, recto. — Le chapitre i : La grand’salle, commençait ainsi :
Il y a aujourd’hui, vingt-cinq juillet 1830, trois cent quarante-huit ans six mois et dix-neuf jours, etc.
Les mots vingt-cinq juillet 1830 ont été biffés.
Feuillet 5, recto. — La date 1 er septembre marque le passage où Victor Hugo reprit son travail ; c’était à l’alinéa : S’il pouvait nous être donné, à nous hommes de 1830, etc.
Feuillet 13, recto. — Le chiffre et le titre du chapitre ii : Pierre Gringoire, ont été ajoutés en marge. Primitivement, le Livre premier n’était pas divisé par chapitres. Les indications des chapitres iii, iv, v et vi sont pareillement écrites en marge.
Feuillet 36, recto. — 15 7 bre 1830. Cette date se lit au commencement du Livre deuxième.
Feuillet 47, recto et verso. — Dans le chapitre : Besos para golpes, après la phrase : Quasimodo se plaça devant le prêtre, fit jouer les muscles de ses poings athlétiques, et regarda les aßaillants avec le grincement de dents d’un tigre fâché, Victor Hugo a biffé les lignes suivantes :
Cependant le duc d’Égypte, vieillard basané au regard pénétrant, avec un nez d’oiseau de proie et une gerbe de rides à chaque coin des yeux, vint examiner l’archidiacre de près. Il retourna vers ses confrères les argotiers et les galiléens, et déclara qu’il était prêt à donner toute la peau de son corps pour la moindre parcelle de la soutane de l’archidiacre.
Feuillet 48, verso. — Dans les premières lignes du chapitre : Les inconvénients de suivre une jolie femme le soir dans les rues, la phrase : Si Gringoire vivait de nos jours, quel beau milieu il tiendrait entre le claßique et le romantique ! est en renvoi, au haut de la marge, ainsi que les deux phrases qu’elle précède.
Feuillet 69, verso. — Dans Une nuit de noces, la chanson de la Esmeralda : Mon père est oiseau, etc., est aussi une addition marginale.
Feuillet 74, recto. — Dans le chapitre : Notre-Dame, on lit : Repris le 16 octobre, avant l’alinéa : C’est ainsi que l’art merveilleux du moyen-âge, etc.
Feuillet 79, recto. — Le commencement du chapitre : Paris à vol d’oiseau, est daté : 18 janvier 1831. Victor Hugo avait bien terminé son roman le 15 janvier 1831, mais il avait réservé cet important chapitre, qui fut plus tard inséré à sa place dans le manuscrit, mais par lequel il a, en réalité, fini d’écrire Notre-Dame de Paris. Il le livra à l’imprimeur par fragments. C’est ainsi qu’il annonce en marge du même feuillet 79 : Ceci est la sélection II du livre trois. Je donnerai la fin après-demain matin. — V. H. Ce lundi. Le fragment s’arrêtait au milieu d’une phrase, sur ces mots : C’était une cité formée de deux couches seulement, la couche romane et la couche gothique. Avec le feuillet 94, nous avons l’achèvement de la phrase et la continuation du chapitre. Ce feuillet porte en marge un nouvel avis : Suite de Paris à vol d’oiseau. (Il y aura encore quatre pages que je donnerai demain.) Le chapitre prend fin au verso du feuillet 97, où l’on voit comme date : 2 février 1831.
Feuillet 84, verso (même chapitre). — En regard de l’alinéa où il parle du « royal et magnifique Louvre », Victor Hugo a écrit : Les monuments actuels sont des contresens de pierre.
Feuillet 90, recto (même chapitre). — Dans la description de l’Hôtel Saint-Pol, Victor Hugo a griffonné à la marge en traits légers « le toit conique, entouré
de créneaux à sa base, » qui « avait l’air de ces chapeaux pointus dont le bord est relevé ».
Feuillet 98, recto. — Les pages intitulées : Les bonnes âmes, qui constituent le premier chapitre du Livre quatrième, formaient primitivement le chapitre iii du Livre troisième. Ainsi de suite pour les autres chapitres, jusqu’à Impopularité. Le Livre quatrième était alors ce qui devint le Livre cinquième. La nouvelle division a été faite quand Victor Hugo eut livré à l’imprimeur le chapitre : Paris à vol d’oiseau.
Feuillet 106, recto. — Le chapitre : Immanis pecoris custos, immanior ipse, avait d’abord pour titre : Le sonneur de cloches.
Feuillet 138, recto. — Le début du chapitre : Coup d’œil impartial sur l’ancienne magistrature, est daté : 27 7 bre.
Feuillet 142, verso (même chapitre). — En haut de la page est notée cette adresse : f. de la Mennais, rue du Colombier, n o 15.
Feuillet 147, recto. — Dans le chapitre : Le Trou aux rats, une date : 1 er octobre, se trouve avant la phrase : Cette cellule était célèbre dans Paris.
Feuillet 150, recto. — Le chapitre : Histoire d’une galette au levain de maïs, était d’abord intitulé : Histoire de l’enfant de la fille de joie.
Feuillet 163, recto (même chapitre). — La marge contient deux petits croquis qui essayent de figurer la Sachette, sous deux faces, « l’une sombre, l’autre éclairée » l’une formant « une espèce de triangle… ».
Feuillet 175, recto. — Le titre du chapitre : Fin de l’histoire de la galette, était primitivement : Eustache.
Feuillet 176, recto. — Une date : 26 octobre, au commencement du chapitre : Du danger de confier son secret à une chèvre.
Feuillet 187, recto (même chapitre). — Tout au haut de la page, une adresse J. A. S t John, avenue de Neuilly, n o 5.
Même feuillet, verso. — Le chapitre : Qu’un prêtre et un philosophe sont deux, a eu pour premier titre : Le philosophe marié. En tête de ce chapitre est une date : 1er 9bre.
Feuillet 197, recto. — Dans le chapitre : Ἀνάγκη, au moment où Jehan Frollo, allant visiter l’archidiacre dans sa cellule, est « parvenu sur la galerie des colonnettes », Victor Hugo a barbouillé en marge une toute petite façade de Notre-Dame.
Feuillet 207, verso. — En général, le manuscrit n’a presque pas de ratures. Par exception, dans cette première page du chapitre : Les deux hommes vêtus de noir, la moitié des lignes ont été biffées.
Feuillet 229, recto. — Le chapitre : L’écu changé en feuille sèche, a été commencé le 20 9bre.
Feuillet 233, verso (même chapitre). — Une importante addition marginale a été faite au récit du jugement de la Esmeralda. Le texte ajouté commence par cette phrase : Le président se baißa vers un homme placé à ses pieds, etc., et finit par celle-ci : Il fallut pour la réveiller, etc.
Feuillet 234, verso. — Un croquis de portail posé en travers encadre le titre du chapitre : Suite de l’écu changé en feuille sèche.
Feuillet 243, verso. — Un croquis sommaire veut représenter la spirale des escaliers et le cachot où est enfermée la Esmeralda.
Feuillet 253, recto. — Le titre primitif du chapitre : La mère, était : La soif de vengeance.
Feuillet 260, recto. — Dans le chapitre : Trois cœurs d’homme faits différemment, se trouve la date : 1 er X bre, en face de l’alinéa : La place du parvis Notre-Dame sur laquelle le balcon donnait, etc.
Feuillet 269, recto. — Le commencement du chapitre : Fièvre, est daté : 3 X bre.
Feuillet 276, verso (même chapitre). — Un griffonnage, trop primitif pour être reproduit, traduit lourdement cette image charmante : Le croißant de la lune, qui venait de s’envoler de l’horizon, était arrêté en ce moment au sommet de la tour de droite, et semblait s’être perché, comme un oiseau lumineux, au bord de la balustrade découpée en trèfles noirs.
Feuillet 288, recto. — Dans le manuscrit, le chapitre : Grès et cristal, a pour titre : Les deux vases.
Feuillet 300, recto. — En tête du chapitre : Gringoire a plusieurs bonnes idées…, la date : 14 X bre.
Feuillet 313, recto. — Dans le chapitre : Vive la joie, les vers que Jehan Frollo cite aux truands et ceux qu’il leur chante ont été ajoutés en marge.
Feuillet 317, recto. — Chapitre : Un maladroit ami. Toute la marge est prise par un ajouté assez étendu commençant aux mots : Ce n’était point chose très rare, etc., et se terminant ainsi : Aujourd’hui il reste à peine son église.
Feuillet 331, recto. — Deux croquis représentant l’un et l’autre Tristan l’Hermite avec sa « face carrée, percée d’yeux à fleur de tête, fendue d’une
immense bouche, dérobant ses oreilles sous deux larges abat-vent de cheveux plats, sans front », et tenant « à la fois du chien et du tigre ».
Feuillet 349, recto. — Dans le chapitre : Le retrait où dit ses heures Monsieur Louis de France, la date : 31 décembre 1830, minuit, précède l’alinéa : Le visage de Louis XI devint sombre et rêveur, etc.
Feuillet 350, recto (même chapitre). — Avant l’alinéa : En cet instant Olivier le Daim rentra, etc., il y a une nouvelle date : 1 er janvier 1831.
Feuillet 355, recto. — Le chapitre : Le petit soulier, est intitulé dans le manuscrit : Le petit soulier ou la chèvre est sauvée. Une date indique qu’il a été commencé le 4 janvier 1831.
Feuillet 390, verso. — Au bas de cette page, la dernière du roman, on lit : 15 janvier 1831, 6 heures 1/2 du soir.
Feuillets 391 et 392, recto. — Table des chapitres. Les chiffres de la pagination semblent être de la main du prote.
Feuillet 393, recto. — C’est la première page de la Note aioutée à l’Édition de 1832.
Feuillet 395, verso. — Le bas de cette page et les deux pages qui suivent sont de l’écriture de Mme Victor Hugo.
Feuillet 397, recto. — La page est encore écrite en grande partie par Mme Victor Hugo. À la marge, quelques lignes ajoutées de la main de Victor Hugo, qui reprend ensuite la plume pour les trois dernières lignes de la page et la garde jusqu’à la fin de la Note.