I

Il viendra, — quand viendront les dernières ténèbres ;

Que la source des jours tarira ses torrents ;

Qu’on verra les soleils, au front des nuits funèbres,

Pâlir comme des yeux mourants ;

Quand l’abîme inquiet rendra des bruits dans l’ombre ;

Que l’enfer comptera le nombre

De ses soldats audacieux ;

Et qu’enfin le fardeau de la suprême voûte

Fera, comme un vieux char tout poudreux de sa route,

Crier l’axe affaibli des cieux.

Il viendra, — quand la mère, au fond de ses entrailles,

Sentira tressaillir son fruit épouvanté ;

Quand nul ne suivra plus les saintes funérailles

Du juste, en sa tombe attristé ;

Lorsqu’approchant des mers sans lit et sans rivages,

L’homme entendra gronder, sous le vaisseau des âges,

La vague de l’éternité.

Il viendra, — quand l’orgueil, et le crime, et la haine,

De l’antique alliance enfreint le vœu ;

Quand les peuples verront, craignant leur fin prochaine,

du monde décrépit se détacher la chaîne ;

Les astres se heurter dans leurs chemins de feu ;

Et dans le ciel, — ainsi qu’en ses salles oisives

Un hôte se promène, attendant ses convives, —

Passer et repasser l’ombre immense de Dieu.

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