XI Le lis du golfe de Santa Restituta

DANS L’ÎLE D’ISCHIA.
1842.

Des pêcheurs, un matin, virent un corps de femme

Que la vague nocturne au bord avait roulé ;

Même à travers la mort sa beauté touchait l’âme.

Ces fleurs, depuis ce jour, naissent près de la lame

Du sable qu’elle avait foulé.

D’où venait cependant cette vierge inconnue

Demander une tombe aux pauvres matelots ?

Nulle nef en péril sur ces mers n’était vue ;

Nulle bague à ses doigts : elle était morte et nue,

Sans autre robe que les flots.

Ils allèrent chercher dans toutes les familles

Le plus beau des linceuls dont on pût la parer ;

Pour lui faire un bouquet, des lis et des jonquilles ;

Pour lui chanter l’adieu, des chœurs de jeunes filles,

Et des mères pour la pleurer.

Ils lui firent un lit de sable où rien ne pousse,

Symbole d’amertume et de stérilité ;

Mais les fleurs de pitié rendirent la mer douce,

Le sable de ses bords se revêtit de mousse,

Et cette fleur s’ouvre l’été.

Vierges, venez cueillir ce beau lis solitaire,

Abeilles de nos cœurs dont l’amour est le miel !

Les anges ont semé sa graine sur la terre ;

Son sol est le tombeau, son nom est un mystère ;

Son parfum fait rêver du ciel.

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