XXIII

ÉCONOMIE SOCIALE ET PHILOSOPHIE

Le caractère des Tahitiens est un peu celui des petits enfants Ils sont capricieux fantasques, boudeurs tout à coup et sans motif ; foncièrement honnêtes toujours, et hospitaliers dans l’acception du mot la plus complète…

Le caractère contemplatif est extraordinairement développé chez eux ; ils sont sensibles aux aspects gais ou tristes de la nature, accessibles à toutes les rêveries de l’imagination…

La solitude des forêts, les ténèbres, les épouvantent, et ils les peuplent sans cesse de fantômes et d’esprits.

Les bains nocturnes sont en honneur à Tahiti ; au clair de lune, des bandes de jeunes filles s’en vont dans les bois se plonger dans des bassins naturels d’une délicieuse fraîcheur. C’est alors que ce simple mot : « Toupapahou ! » jeté au milieu des baigneuses les met en fuite comme des folles… (Toupapahou est le nom de ces fantômes tatoués qui sont la terreur de tous les Polynésiens, mot étrange, effrayant en lui-même et intraduisible…)

En Océanie, le travail est chose inconnue. Les forêts produisent d’elles-mêmes tout ce qu’il faut pour nourrir ces peuplades insouciantes ; le fruit de l’arbre-à-pain, les bananes sauvages, croissent pour tout le monde et suffisent à chacun. Les années s’écoulent pour les Tahitiens dans une oisiveté absolue et une rêverie perpétuelle, et ces grands enfants ne se doutent pas que dans notre belle Europe tant de pauvres gens s’épuisent à gagner le pain du jour…

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