XXXIX

Toujours des vêtements de couleur sombre, cette petite Chrysanthème, ce qui est ici un signe de distinction réelle. Tandis que ses amies, Oyouki-San, madame Touki et les autres, portent volontiers des étoffes bariolées, se plantent dans le chignon des pompons éclatants, elle s’habille de bleu-marine ou de gris neutre, s’attache à la taille de larges ceintures noires brochées de nuances discrètes, et ne met jamais rien dans ses cheveux que des épingles d’écaille blonde. Si elle était de race noble, elle porterait au milieu du dos un petit cercle blanc brodé sur sa robe, apposé comme une estampille, avec, au milieu, un dessin quelconque, – une feuille d’arbre en général : et ce seraient là ses armes. Vraiment il ne lui manque que ce petit blason dorsal pour avoir la tenue d’une femme très comme il faut.

(Au Japon, les belles robes claires, nuancées en nuages, brodées de chimères d’argent ou d’or, sont réservées pour les grandes dames dans leur intérieur, en certaines occasions d’apparat ; – ou alors pour le théâtre, pour les danseuses, pour les filles.)

Comme toutes les Japonaises, Chrysanthème serre une quantité de choses dans l’intérieur de ses longues manches, où des poches sont dissimulées.

Elle y met des lettres, des notes quelconques écrites sur des feuilles fines en pâte de riz, des prières-amulettes rédigées par des bonzes, et surtout une grande quantité de carrés en papier soyeux qu’elle emploie aux usages les plus imprévus : essuyer une tasse à thé, tenir la tige mouillée d’une fleur, ou moucher son petit nez drôle quand l’occasion s’en présente. (Après l’opération, elle froisse tout de suite le morceau qui a servi, le roule en boulette et le jette par la fenêtre avec horreur…)

Les personnes les plus huppées se mouchent de cette manière au Japon.

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