CHAPITRE XXIV

Je ne sais comment cela m’arrive ; depuis quelque temps mes chapitres finissent toujours sur un ton sinistre. En vain je fixe en les commençant mes regards sur quelque objet agréable, – en vain je m’embarque par le calme, j’essuie bientôt une bourrasque qui me fait dériver. – Pour mettre fin à cette agitation, qui ne me laisse pas le maître de mes idées, et pour apaiser les battements de mon cœur, que tant d’images attendrissantes ont trop agité, je ne vois d’autre remède qu’une dissertation. – Oui, je veux mettre ce morceau de glace sur mon cœur.

Et cette dissertation sera sur la peinture ; car de disserter sur tout autre objet il n’y a point moyen. Je ne puis descendre tout à fait du point où j’étais monté tout à l’heure : d’ailleurs c’est le dada de mon oncle Tobie.

Je voudrais dire, en passant, quelques mots sur la question de la prééminence entre l’art charmant de la peinture et celui de la musique : oui, je veux mettre quelque chose dans la balance, ne fût-ce qu’un grain de sable, un atome.

On dit en faveur du peintre qu’il laisse quelque chose après lui ; ses tableaux lui survivent et éternisent sa mémoire.

On répond que les compositeurs en musique laissent aussi des opéras et des concerts ; – mais la musique est sujette à la mode, et la peinture ne l’est pas. – Les morceaux de musique qui attendrissaient nos aïeux sont ridicules pour les amateurs de nos jours, et on les place dans les opéras bouffons pour faire rire les neveux de ceux qu’ils faisaient pleurer autrefois.

Les tableaux de Raphaël enchanteront notre postérité comme ils ont ravi nos ancêtres.

Voilà mon grain de sable.

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