Les Indiens croient que le repos et le néant sont le fondement de toutes choses et la fin où elles aboutissent. Ils regardent donc l’entière inaction comme l’état le plus parfait et l’objet de leurs désirs. Ils donnent au souverain être le surnom d’immobile. Les Siamois croient que la félicité suprême consiste à n’être point obligé d’animer une machine et de faire agir un corps.
Dans ces pays, où la chaleur excessive énerve et accable, le repos est si délicieux et le mouvement si pénible, que ce système de métaphysique paraît naturel ; et Foë , législateur des Indes, a suivi ce qu’il sentait, lorsqu’il a mis les hommes dans un état extrêmement passif ; mais sa doctrine, née de la paresse du climat, la favorisant à son tour, a causé mille maux.
Les législateurs de la Chine furent plus sensés lorsque, considérant les hommes, non pas dans l’état paisible où ils seront quelque jour, mais dans l’action propre à leur faire remplir les devoirs de la vie, ils firent leur religion, leur philosophie et leurs lois toutes pratiques. Plus les causes physiques portent les hommes au repos, plus les causes morales les en doivent éloigner.