Quelquefois les lois et la religion ont établi plusieurs sortes de conjonctions civiles ; et cela est ainsi chez les mahométans, où il y a divers ordres de femmes, dont les enfants se reconnaissent par la naissance dans la maison, ou par des contrats civils, ou même par l’esclavage de la mère et la reconnaissance subséquente du père.
Il serait contre la raison, que la loi flétrît dans les enfants ce qu’elle a approuvé dans le père : tous ces enfants y doivent donc succéder, à moins que quelque raison particulière ne s’y oppose, comme au Japon, où il n’y a que les enfants de la femme donnée par l’empereur qui succèdent. La politique y exige que les biens que l’empereur donne ne soient pas trop partagés, parce qu’ils sont soumis à un service, comme étaient autrefois nos fiefs.
Il y a des pays a où une femme légitime jouit dans la maison, à peu près des honneurs qu’a dans nos climats une femme unique : là, les enfants des concubines sont censés appartenir à la première femme. Cela est ainsi établi à la Chine. Le respect filial 1 la cérémonie d’un deuil rigoureux, ne sont point dus à la mère naturelle, mais à cette mère que donne la loi.
A l’aide d’une telle fiction 2 , il n’y a plus d’enfants bâtards ; et dans les pays où cette fiction n’a pas lieu, on voit bien que la loi qui légitime les enfants des concubines est une loi forcée ; car ce serait le gros de la nation qui serait flétri par la loi. Il n’est pas question non plus, dans ces pays, d’enfants adultérins. Les séparations des femmes, la clôture, les eunuques, les verrous, rendent la chose si difficile que la loi la juge impossible. D’ailleurs le même glaive exterminerait la mère et l’enfant.
a Toute la fin de ce chapitre manque dans A. B.
1 Le P. du Halde, t. II, p. 121. (M.)
2 On distingue les femmes en grandes et petites, c’est-à-dire en légitimes ou non ; mais il n’y a point une pareille distinction entre les enfants. « C’est la grande doctrine de l’empire », est-il dit dans un ouvrage chinois sur la morale, traduit par le même père, p. 140. (M.)