On a fait, dans de certaines monarchies 1 , des lois très-propres à abaisser les États qui font le commerce d’économie. On leur a défendu d’apporter d’autres marchandises que celles du cru de leur pays : on ne leur a permis de venir trafiquer qu’avec des navires de la fabrique du pays où ils viennent.
Il faut que l’État qui impose ces lois puisse aisément faire lui-même le commerce : sans cela, il se fera pour le moins un tort égal. Il vaut mieux avoir affaire à une nation qui exige peu, et que les besoins du commerce rendent en quelque façon dépendante ; à une nation qui, par l’étendue de ses vues ou de ses affaires,sait où placer toutes les marchandises superflues ; qui est riche, et peut se charger de beaucoup de denrées ; qui les paiera promptement ; qui a, pour ainsi dire, des nécessités d’être fidèle ; qui est pacifique par principe, qui cherche à gagner, et non pas à conquérir : il vaut mieux, dis-je, avoir affaire à cette nation qu’à d’autres toujours rivales, et qui ne donneraient pas tous ces avantages 2 .
1 C’est presque toujours de cette façon que Montesquieu désigne la France.
2 En d’autres termes : il vaudrait mieux pour la France avoir affaire aux Hollandais qu’aux Anglais.