Les Métamorphoses en astres.
Je sais quel amour vous avez pour les belles lettres, quelle joie vous éprouvez, quand des jeunes gens de haute naissance se montrent dignes de leurs ancêtres. Je m’empresse donc de vous annoncer que j’ai assisté hier à une lecture de Calpurnius Pison. Il a lu son poème sur les Astres, sujet savant certes et fécond. Il l’a écrit en vers élégiaques coulants, souples et faciles, mais aussi pleins de majesté, comme l’exigeait la matière. Avec à propos et variété, tantôt il élevait, tantôt il baissait la voix ; il passait du grandiose au familier, du vif au grave, du sévère à l’agréable, toujours avec le même bonheur. Ces agréments étaient mis en valeur par la douceur de son accent, et son accent par sa modestie. On voyait sur son visage cette vive rougeur, cette grande appréhension qui recommandent si bien un lecteur. Car je ne sais pourquoi la timidité sied mieux que la confiance aux hommes de lettres. Je m’arrête, quoique j’eusse plaisir à ajouter beaucoup d’autres traits, aussi remarquables dans un homme de cet âge, que rares dans un homme de cette condition. La lecture finie, j’ai embrassé plusieurs fois l’auteur, et persuadé que le plus puissant aiguillon est la louange, je l’ai engagé en le félicitant à continuer dans la voie où il était entré, et, portant le flambeau dont ses ancêtres avaient éclairé sa marche, à guider à son tour ses descendants. J’ai complimenté son excellente mère, j’ai complimenté aussi son frère, qui rapporta de cette salle de lecture autant d’honneur pour sa tendresse fraternelle que le lecteur pour son éloquence, tant il montra, pendant que son frère lisait, d’abord d’inquiétude, puis de joie.
Fasse le ciel que j’aie souvent de semblables nouvelles à vous donner ! Car mon plus vif désir est que notre siècle ne soit pas impuissant et stérile, et je souhaite ardemment que nos patriciens aient dans leurs demeures d’autres titres de gloire que les images de leurs ancêtres. Quant aux deux jeunes Pisons, il me semble que ces images aujourd’hui les applaudissent en silence, les encouragent et (ce qui suffit à leur gloire à tous les deux) les avouent pour leur sang. Adieu.