Les prêtres, les vieillards et les chefs ont, dans l’émerveillement, écouté mon récit ; jusqu’au fond des solitudes les coureurs sont allés répéter la bonne nouvelle. Le grand Conseil a ordonné aux guerriers de se réunir à la sixième lune de l’an 22 649, dans la plaine de Mehour-Asar, et les prophètes ont prêché la guerre sacrée. Plus de cent mille guerriers Zahelals sont accourus ; un grand nombre de combattants des races étrangères, Dzoums, Sahrs, Khaldes, attirés par la renommée, sont venus s’offrir à la grande nation.
Kzour a été cerné d’un décuple rang d’archers, mais les flèches ont toutes échoué devant la tactique xipéhuze, et des guerriers imprudents, en grand nombre, ont péri.
Alors, pendant plusieurs semaines, une grande terreur a prévalu parmi les hommes…
Le troisième jour de la huitième lune, armé d’un couteau à pointe fine, j’ai annoncé aux peuples innombrables que j’allais seul combattre les Xipéhuz dans l’espérance de détruire la défiance qui commençait à naître contre la vérité de mon récit.
Mes fils Loûm, Demja, Anakhre, se sont violemment opposés à mon projet et ont voulu prendre ma place. Et Loûm a dit : « Tu ne peux pas y aller, car, toi mort, tous croiraient les Xipéhuz invulnérables, et la race humaine périrait. »
Demja, Anakhre et beaucoup de chefs ayant prononcé les mêmes paroles, j’ai trouvé ces raisons justes et je me suis retiré.
Alors, Loûm, s’étant emparé de mon couteau à manche de corne, a passé la frontière mortelle et les Xipéhuz sont accourus. L’un d’eux, beaucoup plus rapide que les autres, allait l’atteindre, mais Loûm, plus subtil que le léopard, s’écarta, tourna le Xipéhuz, puis d’un bond géant, rejoignit, darda la pointe aiguë.
Les peuples immobiles virent crouler, se condenser, se pétrifier l’adversaire. Cent mille voix montèrent dans le matin bleu, et déjà Loûm revenait, franchissait la frontière. Son nom glorieux circulait à travers les armées.