A Paris, ce 16 décembre 1683.
Enfin, après tant de peine, je marierai mon pauvre garçon[635]. Je vous demande votre procuration pour signer à son contrat de mariage. Voilà deux petites lettres d'honnêteté que je vous prie de faire tenir à ma tante de Toulongeon et à mon grand cousin. Il ne faut jamais désespérer de sa bonne fortune. Je croyais mon fils hors d'état de pouvoir prétendre à un bon parti, après tant d'orages et tant de naufrages, sans charges et sans chemin pour la fortune; et pendant que je m'entretenais de ces tristes pensées, la Providence nous destinait ou nous avait destinés à un mariage si avantageux, que, dans le temps où mon fils pouvait le plus espérer, je ne lui en aurais pas désiré un meilleur. C'est ainsi que nous marchons en aveugles, ne sachant où nous allons, prenant pour mauvais ce qui est bon, prenant pour bon ce qui est mauvais, et toujours dans une entière ignorance. Auriez-vous jamais cru aussi que le père Bourdaloue, pour exécuter la dernière volonté du président Perrault, eût fait depuis six jours aux Jésuites la plus belle oraison funèbre qu'il est possible d'imaginer? Jamais une action n'a été admirée avec plus de raison que celle-là. Il a pris le prince dans ses points de vue avantageux; et comme son retour à la religion a fait un grand effet pour les catholiques, cet endroit, manié par le père Bourdaloue, a composé le plus beau et le plus chrétien panégyrique qui ait jamais été prononcé[636].