XXIX Réunion de famille

Le camion est venu se garer devant l’Institut Océanographique à dix heures et demie. Quatre malabars en sont descendus et nous ont rejoints dans le hall.

— Monsieur Troudic ?

— C’est moi-même, bonjour messieurs, nous vous attendions.

Nous les avons accompagnés au sous-sol. Dans son bassin, presque immobile, Ouin-Ouin flottait à la surface, tellement épuisé qu’il n’avait même plus la force de pleurer. Il a à peine réagi lorsque nous l’avons transféré dans la baignoire. Nous sommes remontés par l’escalier de service et l’avons installé à l’arrière du camion. Puis nous avons roulé jusqu’au vieux Port où Edmond Gerbillon avait mis son yacht personnel à ma disposition. Une fois à bord, nous nous sommes dirigés vers le large.

Arrivés à l’entrée de la baie de Saint-Glinglin, nous avons sorti délicatement Ouin-Ouin de la baignoire à l’aide d’une bâche et l’avons fait descendre tout doucement le long de la coque. Lorsqu’il s’est retrouvé dans l’eau, il a d’abord semblé un peu perdu et est resté là, sans bouger. Et puis, il a poussé un petit vagissement hésitant, suivi d’un autre, un peu plus fort… Quelques secondes plus tard, deux lamantins sont apparus à la surface et sont venus se coller contre lui… et puis d’autres ont surgi un peu plus loin, et d’autres encore… bientôt, tout le troupeau était là. Lorsque qu’ils se sont mis à chanter, on a pleuré comme des madeleines. Ensuite ils ont plongé et ont disparu.

Nous sommes restés encore quelques instants à contempler l’océan, puis nous avons fait demi-tour. Soudain, la mer s’est mise à bouillonner furieusement et d’énormes bulles sont venues exploser à la surface.

— Mon Dieu, François, une éruption volcanique !

— Mais non Géraldine, rassures-toi… c’est le troupeau qui pète de joie.

 

FIN

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