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Défiez-vous constamment des inventions nouvelles, telles que : les huiles de Macassar, les poudres à rasoir, les pâtes de jeunesse, les fioles virginales, les scaphandres, les cafetières, les lignes qui se fourrent dans une canne, les parapluies qui rentrent dans un fourreau de tôle, les lits qui se cachent dans un mur, les fourneaux économiques qui coûtent à établir plus que cent fourneaux, les cheminées de cent écus qui doivent chauffer sans bois, les fusils, les marbres factices, les bottes sans couture, etc. En général, tout ce qui porte le nom d’économique est une invention coûteuse ou impraticable.

Il y a, de par le monde, un brave et honnête cultivateur qui inventa, il y a quelques années, un outil pour empêcher, au moyen d’une incision annulaire, la vigne de couler. Ce digne homme remédie effectivement à ce grave inconvénient qui perd les récoltes précieuses ; mais il n’a pas vu qu’avant que l’on ait pratiqué cette circoncision de la vigne sur des clos de cinquante, soixante arpents, le raisin a le temps de mûrir, tel nombre d’ouvriers qu’on y emploie.

Cette invention, très ingénieuse et remarquable, est bonne pour ceux qui ont un arpent ou deux de vignes, mais inutile au reste des cultivateurs. Cet exemple nous a frappé entre mille autres.

Aussi ces inventions-là sont-elles bien les plus terribles impôts qu’on ait jamais levés sur les honorables bourgeois. Que l’on ne nous accuse pas ici de vouloir étouffer l’industrie ; nous applaudirons de toutes nos forces aux inventions réellement utiles ; mais nous ne cesserons de répéter à l’occasion des charlataneries :

Attendez que la voix publique et un assez long usage aient consacré les inventions nouvelles, alors vous participerez à leurs bienfaits, moyennant la somme de dix, vingt, trente ou quarante francs.

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