Un bel enthousiasme dont tous les enfants sont victimes tous les ans, lorsqu’ils sont en pension, c’est celui-ci :
La fête de l’honorable instituteur arrive ; on complote de la lui souhaiter. On demande à son épouse quel est le meuble, la pièce d’argenterie dont l’offrande serait agréable à Monsieur.
« Non, mes enfants, dit-elle toute confuse, non, je ne vous le dirai pas : l’année dernière vous donnâtes douze couverts, et vous savez combien Monsieur a été mécontent ; il a failli ne pas accorder le congé ; non, ne donnez rien. »
C’est de l’huile sur le feu : on s’impose par tête, on se moque de ceux qui donnent peu : c’est à qui harcèlera père et mère pour avoir davantage ; on prend même sur ses menus plaisirs. Oh ! quel âge d’innocence ! avec quelle bonne foi on conspire soi-même à se duper !
On offre la soupière. L’instituteur se fâche, gronde et sa modestie paraît dans tout son éclat. Il accorde le congé d’un air sévère et promet de punir l’année suivante si pareil scandale a lieu. Encore dix ans, et son service sera complet. « Ce sont de bien bons enfants !… » dit-il à son épouse. Puis à chaque père en particulier il assure pendant quelque temps que son fils fait des progrès, qu’il promet, que c’est un fort joli sujet !