4 De la loterie

À la porte du bureau de loterie, un joli tableau, orné de nœuds de rubans roses et verts, présente aux regards qu’il attire les bienheureux billets gagnants. Comme ces billets sont doucement provocateurs, comme ils parlent à l’imagination ; celui qui les a pris a fait fortune, il est heureux maintenant, il peut satisfaire tous ses désirs. Oui ! mais si l’on pouvait placer en regard les peines, les tourments, les malheurs que cause une passion funeste ; si l’on montrait le père jouant la fortune de sa femme, l’existence de ses enfants, dupe d’abord, plus tard fripon, finissant par devenir criminel. La loterie occasionne plus de suicides que la misère : elle traîne à sa suite le désespoir et la mort.

Mais tout le monde n’y perd pas ? Tout le monde y perd. Celui à qui échoit un terme l’a d’avance payé bien cher, ou plus tard perdra plus qu’il n’a gagné.

Depuis longtemps des voix éloquentes s’élèvent en vain pour réclamer l’abolition de cette immorale institution. La seule manière de couper court au mal, c’est d’en démontrer l’évidence. Le jour où tout le monde sera bien convaincu que l’argent mis à la loterie est perdu sans retour, que les sept millions que le gouvernement retire de la loterie sont un bénéfice honteux, le fruit du vol ; le jour enfin où personne ne mettra plus à la loterie, l’autorité qui respecte la morale publique quand son intérêt ne lui conseille pas de la violer, supprimera les loteries qui lui seront devenues onéreuses.

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