CHAPITRE II LES PRÉLIMINAIRES DU VOYAGE

Le récit de son exploration au Maroc, publié par le vicomte de Foucauld, commence à Tanger et à la date du 20 juin 1883. Or, le voyageur avait quitté Alger le 10 juin, et il ne devait pas, selon ses projets, pénétrer par le nord dans l’empire défendu, mais chercher sa route par le Rif, en traversant la frontière algéro-marocaine. Quelles raisons l’en ont empêché ? Que s’est-il passé entre le 10 et le 20 juin ? Nous n’en saurions pas grand’chose si, par bonheur, revenu à Paris, au milieu des siens, l’explorateur n’avait calligraphié, à l’intention d’un de ses neveux, et sur de belles pages de vélin qui furent reliées avec les feuillets imprimés, trois fragments importants, dont le premier raconte précisément les préparatifs du voyage et les incidents du début. Je publierai d’abord cette sorte de préface inédite de la Reconnaissance au Maroc. De même, je citerai en entier l’histoire du guide Mardochée, non pas tant parce qu’elle est amusante, dramatique, un peu folle, comme tant d’histoires orientales, mais parce qu’elle fait connaître admirablement à quelle espèce d’homme Charles de Foucauld s’était confié. Enfin, lorsqu’en analysant le livre à grands traits, je serai arrivé à ce passage, volontairement écourté, où l’auteur raconte son séjour à Bou el Djad, je publierai le troisième fragment, en tête duquel il écrivait ces lignes : « J’eus des relations avec plusieurs membres de la famille de Sidi ben Daoud. Je les ai tues dans mon ouvrage, parce que si la connaissance en était parvenue au sultan, cela aurait créé des dangers à mes amis de Bou el Djad. À toi, mon cher neveu, je vais les raconter. »

Aujourd’hui, elles peuvent être racontées au public ces entrevues au cours desquelles le jeune officier français, habilement interrogé, et se sentant deviné, s’avoua chrétien, et se confia à l’honneur de son hôte. Le temps a couru. Ce qui pouvait être une cause d’ennuis, – la mort était parmi ces ennuis possibles, – sous le règne des anciens sultans, a repris son caractère véritable de générosité rare et de chevalerie. Le traité de 1912 a permis de l’imprimer.

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