Entre l’Islam et la philosophie grecque, les rapports étaient tout autres qu’entre christianisme et philosophie : il n’y a, dans l’Islam, ni cette dogmatique compliquée qui emploie des notions néoplatoniciennes, ni une Église qui surveille les hérétiques et dirige, par les sacrements, la vie spirituelle de l’homme ; le philosophe n’est pas nécessairement un clerc, et le théologien n’est pas nécessairement philosophe. Le conflit est donc moins à l’intérieur de la religion qu’il n’est entre l’Islam, d’origine arabe, et les courants de pensée qu’il n’a ni produits ni entretenus et qui restent très vivants dans les vastes régions où il se répand. Tantôt l’autorité accueille bien les philosophes, tantôt l’Islam se défend contre eux. Il ne faut pas d’ailleurs se figurer ces philosophes, pas plus dans l’Islam qu’en Occident, comme des libres penseurs, réclamant les droits de la raison ; c’est par suite d’une confusion qu’Averroès put devenir, quand ses œuvres eurent passé en Occident, le type du libre penseur. Tout comme Avicenne, il prétend penser dans les cadres de l’Islam.