La culture physique et les femmes

Le Matin, 18 décembre 1913

« À quelle heure prenez-vous votre leçon de culture physique ? – La culture physique m’a ôté douze livres. – N’allez pas chez le professeur Chose : il a fait venir un rein flottant à une de nos amies ! »

Culture physique, culture physique ! elles y courent, elles y emploient leur enthousiasme de chien bull et leur inconstance de fox-terrier. Elles en font toutes, pas très longtemps, « le temps de se démolir quelque chose », selon le mot mélancolique d’un professeur, qui m’avouait :

– J’aime mieux avoir affaire à des enfants qu’à des femmes. Un enfant comprend, un enfant obéit. Mais une femme – ou plutôt les femmes… en matière de culture physique – on peut les diviser en trois catégories : celle qui « ne peut pas » et qui geint : « Aïe, mon épaule, aïe, ma jambe !… » ; celle qui dit : « Ce n’est que ça ?… » et qui retourne au tango ; enfin celle qui veut épater tout le monde et d’abord son professeur. Celle-ci qu’on peut nommer aussi « l’élève sérieuse », est la plus terrible. Elle travaille – elle travaille trop. Elle s’exerce en secret, elle fait du zèle. Je lui demande quinze mouvements et dix minutes d’exercice : elle dépasse, elle double, elle décuple mon ordonnance. Elle rêve athlétisme, performances, et marche malgré moi à l’épuisement, tout en discourant hygiène, gymnastique et existence rationnelles… Rationnelles ! Je me demande quel sens elles peuvent bien donner à ce mot-là… Je crois que pour elles ça signifie tout nu, ou quelque chose comme ça…

« Au bout d’une quinzaine, d’un mois, le médecin est forcé d’intervenir, pour cause d’inflammation, de rein déplacé, de hernie, et bénéficiant toujours du manque de mesure féminin, je troque, moi pauvre homme, mon titre de bienfaiteur de l’humanité contre celui d’assassin, de bluffeur et d’escroc… »

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