VIII

Nous aimons, colons éparpillés sur la côte, les dîners impromptus, parce qu’ils nous réunissent pour une heure ou deux et parce qu’ils ne violent pas la paix de nos demeures, le secret de notre vie d’été qui ne comporte point de réunions d’après-midi ni de goûters à cinq heures. Le protocole de la saison veut qu’un caprice unanime, plutôt qu’une amicale préméditation, règle nos rapports. Une invitation à huitaine nous trouvera hésitants, évasifs : « Ah ! je ne sais pas si je suis libre… Justement le gars Gignoux doit nous mener à La Seyne… » Ou bien nous travaillons, ou nous projetions d’aller « justement » en forêt manger du gibier braconné…

Le hasard, d’habitude, confie notre vœu de sociabilité brève à une voix, on ne sait d’avance laquelle. C’est celle du Grand Dédé, c’est le petit fifre nasillé de Dorny, le bâillement boulimique de Daragnès qui soupire : « Il fait creux… » Il faut aussi que la demie de sept heures ait sonné au clocher bulbeux, qu’une dernière flammèche du couchant, dansant au ventre des siphons, rejaillisse dans l’œil vert et sorcier de Segonzac, et que des façades roses du quai, plus chaudes que l’air rafraîchi, sorte une vague odeur de pain. La voix nonchalante s’élève :

– Qu’est-ce qu’il peut bien y avoir à manger chez la Lyonnaise ?

Personne n’a bougé, et pourtant la réponse arrive, chargée de précisions surprenantes.

– Rien. Des tomates, et du jambon de pays.

– Chez nous, il y a une grosse mortadelle, et du beau gorgonzola, murmure une autre voix douce qui est celle de la violoniste Morhange. Mais ça ne fait pas assez pour tous…

– Et ma soupe de mes oignons gratinée, c’est de la crotte de bique, alors ? crie Thérèse Dorny, ou Suzanne Villebœuf.

Segonzac alors se lève, ôte de son chef un chapeau de feutre antique :

– Mes bons messieurs, mes bonnes dames, c’est-i qu’eune virée jusqu’à chez moué vous ferait peûr ? Je ne sons qu’un simple pésan, j’ons ce que j’ons, mais foi de manant, j’ons le quieur sur la main et la main partout…

Le Ravissant est encore à son jeu favori d’imitateur que des pieds muets, chaussés d’espadrilles, courent, et que jambon de pays, tomates et pêches, fromages, tartes de frangipane, saucisson façonné en gourdin, pains longs qu’on étreint comme des enfants volés, soupière chaude liée dans une serviette prennent avec nous, sur deux ou trois voitures, le chemin raviné de la colline. La manœuvre nous est familière, vingt minutes plus tard, la table dressée sous un toit de clayonnage nous fait fête, et le vert clair-de-lune d’anciens feux de tribord, haut pendus aux branches, coule onctueux sur la feuille convexe des magnolias.

Ainsi étions-nous hier soir, en haut de la colline. L’échancrure de mer, en bas, retenait une laiteuse clarté qui n’avait plus sa source dans le ciel. Nous distinguions les lumières du port, immobiles, et leur reflet tremblant. Au-dessus de nos têtes, entre deux flambeaux, une longue grappe de raisin mûrissant oscillait, et l’un de nous détacha un grain blond :

– On vendangera tôt, mais maigrement.

Mon métayer dit que nous ferons tout de même dix hectos, affirma Segonzac avec orgueil. Chez vous, Colette ?

– Je compte un tiers de récolte, il n’a pas assez plu et c’est de la très vieille vigne : dix-huit cents à deux mille.

– Deux mille quoi ?

– Litres mais je n’en ai que la moitié pour moi.

– Feu de Dieu, ma bonne fille, vous allez vous mettre marchande !

– Mille litres ! soupira avec accablement Suzanne Villebœuf, comme si on la condamnait à les boire.

Elle portait une robe à ramages de fleurs sur un fond noir, une étoffe villageoise d’Italie qu’elle avait taillée à la mode de l’ancienne Provence, et personne ne pouvait expliquer pourquoi elle semblait déguisée en gitane.

L’air fleurait l’eucalyptus et les pêches bletties. Des bombyx et de délicats papillons des groseilliers crépitaient, brûlés, dans les calices des photophores. Hélène Clément, patiente, sauvait les moins atteints du bout d’une fourchette à pickles, puis par pitié les donnait au chat.

– Ah ! une étoile filante…

– Elle est tombée sur Saint-Raphaël…

Nous avions fini de manger, et presque de parler. Un grand cruchon de verre commun et verdâtre, à ombilic saillant, se traînait paresseusement autour de la table et saluait, sans se soulever, pour emplir encore nos verres d’un bon vin de Cavalaire, jeune, à arrière-goût de bois de cèdre, dont la chaleureuse vapeur réveillait quelques guêpes. Notre sociabilité, contentée, était tout près de rendre sa place, par droit de marée régulière, à notre insociabilité. Les peintres, assommés de soleil, eussent cédé à une torpeur enfantine, mais leurs femmes, reposées l’après-midi dans une paix de harem, tournaient de grands yeux vers le golfe et fredonnaient tout bas.

– Après tout, risqua l’une d’elles, il n’est que dix heures moins le quart.

– « Valsez, jolies gosses » chanta un soprano timide, qui s’en tint là.

– Si Carco était ici… dit une autre voix.

– Carco ne danse pas. Ce qu’il nous faudrait, c’est Vial.

Sur quoi, il y eut un très court silence et Luc-Albert Moreau, agité de la crainte qu’on ne me fît du mal, s’écria :

– C’est vrai, c’est vrai, il nous faudrait Vial ! Mais puisqu’il n’est pas là, n’est-ce pas… Eh bien, il n’est pas là, voilà tout !

– Il prépare son exposition de blanc et ses soldes en articles de ménage, dit avec dédain Thérèse, qui, cherchant à louer « une petite boutique rigolote », convoite le magasin parisien de Vial.

– Il est à Vaison, derrière Avignon, dit Hélène Clément.

Mes amis la regardèrent sévèrement.

Elle tenait les yeux baissés, et nourrissait de phalènes grillées, sur ses genoux, le chat noir qui ressemblait à un congre.

– C’est bon pour le faire crever, lui remontra Morhange, vindicative. N’est-ce pas, madame Colette ?

– Mais non, pourquoi ? C’est gras et rôti. Naturellement je ne ferais pas griller exprès des papillons pour les chats, mais on ne peut pas empêcher les bombyx de courir aux photophores.

– Ni les femmes d’aller danser, soupira en se levant un long paysagiste. Allons, un tour chez Pastecchi ! Mais on rentre de bonne heure ?

Une des jeunes femmes jeta un « Oui ! » aigu comme un cri de cavale, des phares tournoyèrent sur la vigne, foudroyant çà et là un cep de mercure, un chien de sel, un livide rosier terrifié. À Luc-Albert prosterné en suppliant devant une petite automobile ancienne et butée, Thérèse Dorny jeta en passant :

– Il ne tire pas, ce soir, ton Mirus ? et nos rires descendirent la côte, à la file, portés par de discrètes voitures au point mort.

À mesure que nous nous rapprochions de la mer, le golfe s’étoilait davantage. Contre mon bras nu, je sentais le bras nu d’Hélène Clément. Depuis le départ de Vial, je ne l’avais pas revue sauf sur le quai, chez le libraire, à l’heure du marché, à l’heure de la citronnade, et jamais seule. Dans les premiers jours de la semaine, elle me témoignait un empressement, une déférence équivalents à des « Eh bien ?… Eh bien ?…qu’avez-vous fait ? Quoi de nouveau ?… » auxquels je n’avais rien répondu. Elle s’était – je le croyais – résignée, et songeait – mais comment ai-je pu le croire ? – à autre chose… Son bras nu, dans l’ombre, se plia sous le mien.

– Madame Colette, vous savez, chuchota Hélène, je ne le sais que par une carte postale.

– Quoi donc, mon enfant ?

–Et c’est une carte postale de ma mère, qui est avec papa à Vaison chez ma grand’mère Clément, poursuivit-elle en enjambant ma question. Avec ma famille, ils se connaissent. Mais j’ai pensé que je pouvais ne pas le dire tout à l’heure… que c’était mieux… Je n’ai pas pu vous consulter là-dessus avant dîner.

Je pressai le bras nu, frais comme le soir :

– C’était mieux.

Et j’admirai qu’elle sût si bien ce qui est mieux, ce qui est moins bien, j’admirai son visage plein de projets, tourné vers les événements, les arrivées, les embarcadères…

Quand la nuit s’est fermée, réduisant la mer à son langage de clapotis, claquements de gueule, mâchouillement obscur entre les ventres des bateaux amarrés, l’immensité marine à un petit mur noir, bas et vertical contre le ciel, le scandale du bleu et de l’or à des feux de jetée, le négoce à deux cafés et à un petit bazar noctambule, alors nous découvrons que notre port est un tout petit port. Quand nous passâmes, un yacht étranger, en bonne place, à ras de quai, exhibait sans pudeur ses cuivres, son électricité, son pont en bois des îles, son dîner cerné d’hommes au torse nu, de femmes en robes basses à grands rangs de perles, ses serveurs immaculés et qui semblaient tous vierges. Nous nous arrêtâmes pour contempler l’arche magnifique apportée par la mer et que la mer allait reprendre quand ces gens auraient jeté par-dessus bord leur dernière pelure de fruit, et pavoisé l’eau de leurs journaux flottants.

– Vé, dis, passe la cigarette, leur cria du quai un garçon en savates.

Un des passagers exposés se tourna pour toiser l’enfant perché sur la passerelle, et ne répondit pas.

– Vé, dites, à quelle heure c’est que vous faites l’amour ? Si c’est tard, j’ai peur de pas pouvoir rester jusque-là…

Il s’envola, récompensé par nos rires.

Cent mètres plus loin, dans l’aisselle de la jetée, Pastecchi tient bal et débit de boissons. Le coin est bon, garé du vent. Il est beau, puisqu’il regarde à la fois un pan de mer prisonnière, les tartanes relevées de bandes peintes, et les maisons plates à base épatée, d’un lilas tendre et d’un rose de tourterelle. Un petit homme éreinté, qui a l’air paresseux et qui se repose rarement, veille sur la nudité d’une salie rectangulaire, comme s’il était chargé d’en écarter toute parure. On n’y voit pas une guirlande aux murs, pas un bouquet sur le coin du comptoir, ni une couleur neuve, ni un jupon de papier autour des ampoules électriques. Comme dans une chapelle mortuaire pour pauvres, c’est sur le catafalque que s’amasse un faste de fleurs et de superfluité. Je nomme catafalque le piano mécanique, ancien, éprouvé par le temps, d’un noir de vieux frac. Mais il n’est aucun de ses panneaux qui n’encadre, peints au naturel, Venise, le Tyrol, un lac sous la lune, Cadix, des glycines et des rubans bleus. Il avale, par une mince bouche bordée de cuivre, des jetons de vingt centimes, et les rend au centuple en polkas métalliques, en javas de fer-blanc terne, trouée de grands trous de silences phtisiques. C’est une musique creuse, d’une rigueur si funèbre que nous ne la supporterions pas sans danseurs. Dès que les premières mesures précipitent, dans le coffre, un effondrement rythmé de vieux sous, de morceaux de verre et de peignes de plomb, un couple, deux couples, dix couples de danseurs tournent, obéissants, et si l’on n’entend pas glisser les semelles de chanvre, on perçoit le bruissement soyeux des pieds nus.

J’écris danseurs, et non danseuses. Elles sont, à la Jetée, une minorité négligée. Jolies, hardies et le cou rasé, elles apprennent des touristes le chic de la jambe hâlée et du foulard sans pareil. Mais quand « l’étrangère » vient au bal, le soir, en espadrilles, la fille du pays chausse son pied nu de souliers vernis.

Nous nous serrâmes tous, sur les bancs de bois chancelants, autour d’un marbre fendu.

Encore fallut-il que de jeunes ouvriers de l’usine et deux marins reculassent, pour nous faire place, leurs reins de matous et leurs verres pleins d’anis. Hélène Clément cala son épaule nue, sa hanche et sa longue jambe contre une jeune bête de mer polie comme un bois précieux, avec la sécurité d’une fille qui ne s’est jamais trouvée, au creux d’un chemin désert, à trois pas d’un inconnu muet, immobile et les mains ballantes. Quelques hommes tiennent pour impudence, chez Hélène, ce qui n’est que pureté persistante. Elle se releva promptement, et s’en alla valser aux bras du matelot bleu, qui dansait comme font les garçons ici, c’est-à-dire sans paroles, lié à sa danseuse d’une étreinte étroite et impersonnelle, en portant haut son visage où rien ne se lisait.

Autour d’un si beau couple tournaient, sous le châtiment de l’exécrable illumination, quelques habitués de la côte, deux Suédois, – mari et femme, frère et sœur ? – tout en vermeil pâle des chevilles aux cheveux, des Tchéco-Slovaques massifs, traités selon le minimum de ciselure corporelle, deux ou trois Allemandes nouvelle manière, maigres, demi-nues, noiraudes et chaudes à l’œil, autant de taches colorées sur un fond sombre d’adolescents sans linge, le cou pris dans un mince tricot noir, de matelots bleus comme la nuit, de débardeurs de tartanes épais et légers en airain rougeâtre, héros de la danse… Ils valsaient entre eux, sous l’attention impure d’un public venu de loin pour les voir. Deux amis, jumeaux par la stature, par les pieds déliés, la similitude du sourire, qui ne daignaient pas, de tout l’été inviter une « garce de Paris », vinrent se reposer près de nous, acceptèrent du grand Dédé qui les admirait une bouteille de gazeuse, répondirent, à une question indiscrète : » Nous dansons nous deux parce que les filles, elles dansent pas assez bien », et s’en allèrent renouer leurs bras, mêler leurs genoux.

Une brune frénétique aux cheveux droits, en fichu jaune, venue telle quelle, en automobile, d’une plage voisine, trinquait du ventre avec un distant ouvrier, qui la tenant aux reins semblait ne pas la voir. Un noir jeune homme enchanteur, en chemise de pilou gris déchirée, comme chevillé à un autre jeune homme fin, vide, immatériel, plus blanc à cause d’un foulard rouge serré en haut du cou sous l’oreille, nous jetait en passant des regards de défi, et un mulâtre en forme de marteau, – les épaules démesurées, la taille à passer dans une jarretière, – portait sur son cœur, soulevé de terre, un enfant presque endormi de giration, qui laissait baller sa tête et pendre ses bras…

Point d’autre vacarme que celui du billon, de la vaisselle et des dominos moulus ensemble dans le piano mécanique. On ne vient pas à la Jetée pour causer, ni même pour se saouler. À la Jetée, on danse.

Les fenêtres ouvertes laissaient entrer l’odeur des écorces de melon flottantes sur l’eau du port ; entre deux moitiés de tangos, un long soupir annonçait qu’une vague, née au large, achevait de mourir à quelques pas de nous.

Mes jeunes compagnes regardaient tourner les couples mâles. Dans leur excès d’attention, je pouvais lire ensemble la défiance et le penchant qu’elles ont pour les énigmes. Le grand Dédé, rapetissant son œil vert, prenait un calme plaisir, penchait de côté la tête, disait de temps en temps :

– C’est joli… C’est joli. C’est déjà gâté, mais c’est joli. L’été qui vient, ils danseront parce que Volterra les regardera danser…

La petite tzigane Villebœuf tournoya à son tour comme une corolle. Nous nous gardions de parler, étourdis de tournoiement et de déplaisante lumière. Le vent de la danse collait au plafond un voile de fumée qui essayait, à chaque pause, de redescendre, et je me souviens que j’étais contente de ne presque pas penser, d’acquiescer à la musique concassée, au petit vin blanc de l’année qui tiédissait sitôt versé, à la chaleur grandissante, qui s’enrichissait d’odeurs… Le gros tabac triomphait, puis reculait devant la menthe verte, qui s’effaçait sous un rugueux relent de vêtements trempés dans la saumure ; mais au passage un torse brun, gainé d’un petit justaucorps de tricot sans manches, fleurait le copeau de santal, et la porte battante de la cave libérait la vapeur du vin égoutté sur le sable… Une bonne épaule d’ami m’étayait, et j’attendais que la satiété me rendît la force et l’envie de me lever, de retourner vers mon royaume exigu, vers les chats anxieux, la vigne, les noirs mûriers… Je n’attendais que cela… encore une minute, et je m’en vais… que cela, vraiment…

– Y a pas, dit une jeune femme couleur de cannelle, c’est Vial qu’il nous aurait fallu, ce soir.

– Ramène-moi chez moi, Hélène, dis-je en me levant, tu sais bien que je ne peux pas conduire la nuit.

Je me rappelle qu’elle me conduisit très doucement, évitant les pierres et les trous qui nous sont familiers, et qu’elle orienta ses phares, à l’arrivée, de manière qu’ils éclairassent l’allée.

En chemin, elle me parla bal, température et vicinalité, sur un ton si contenu, si gros de sollicitude et de prévenance que lorsqu’elle se risquait à me demander d’une voix émue :

– Est-ce que ça ne fait pas trois ans qu’on n’a comblé ces deux trous-là ?

J’étais tentée de lui répondre :

– Non, merci, Hélène, je n’ai pas besoin de ventouses ce soir, et la potion bromurée est inutile.

Je la devinais pleine de zèle et de soins, comme si elle eût palpé sur moi une meurtrissure indolore, un sang répandu que moi-même je ne sentais pas. C’est pour la remercier que je lui dis, quand elle courut ouvrir ma grille qui n’a point de serrure, tandis que je déposais à terre ma brabançonne âgée :

– Tu étais superbe ce soir, Hélène, encore mieux que le mois dernier.

Elle se tint toute droite de fierté devant les phares :

– Oui ? Je sens que c’est vrai, madame Colette. Et ce n’est pas fini Ça ne fait que commencer. Je crois…

Elle levait le doigt comme un grand ange de combat, debout au centre d’un halo blanc. À bout de mystère elle tourna la tête vers le « Dé »…

– Ah oui ?… fis-je vaguement, et je me hâtai sur l’allée, avec une sorte de répugnance pour tout ce qui n’était pas mon gîte, l’accueil des bêtes, le linge frais, une caverne de silence… Mais Hélène s’élança, me saisit au coude, et je ne vis plus, devant nous, que deux ombres démesurées d’un bleu d’encre, qui couchées et rampantes sur la terre se brisaient au pied de la façade, l’escaladaient verticales et gesticulaient sur le toit :

– Madame, c’est fou, c’est stupide, mais sans raison aucune j’ai une… j’ai un pressentiment… comme un grand espoir… Madame, je vous suis très dévouée, vous savez… Madame, vous comprenez tout…

Sa longue ombre donna à mon ombre plus courte un baiser incohérent qui tomba quelque part dans l’air, et elle me quitta en courant.

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