Dorimant, Lysandre
Dorimant
Eh quoi ! pour m’avoir vu, vous changez de dessein ?
Ne craignez point pour moi d’entrer chez Hippolyte ;
Vous ne m’apprendrez rien en lui faisant visite ;
Mes yeux, mes propres yeux n’ont que trop découvert
Comme un ami si rare auprès d’elle me sert.
Lysandre
Parlez plus franchement : ma rencontre importune
Auprès d’un autre objet trouble votre fortune ;
Et vous montrez assez, par ces faibles détours,
Qu’un témoin comme moi déplaît à vos amours ;
Vous voulez seul à seul cajoler Célidée ;
La querelle entre nous sera bientôt vidée :
Ma mort vous donnera chez elle un libre accès.
Ou ma juste vengeance un funeste succès.
Dorimant
Qu’est-ce-ci, déloyal ? quelle fourbe est la vôtre ?
Vous m’en disputez une, afin d’acquérir l’autre !
Après ce que chacun a vu de votre feu,
C’est une lâcheté d’en faire un désaveu.
Lysandre
Je ne me connais point à combattre d’injures.
Dorimant
Aussi veux-je punir autrement tes parjures :
Le ciel, le juste ciel, ennemi des ingrats,
Qui pour ton châtiment a destiné mon bras,
T’apprendra qu’à moi seul Hippolyte est gardée.
Lysandre
Garde ton Hippolyte.
Dorimant
Et toi, ta Célidée.
Lysandre
Voilà faire le fin, de crainte d’un combat.
Dorimant
Tu m’imputes la crainte, et ton cœur s’en abat !
Lysandre
Laissons à part les noms ; disputons la maîtresse,
Et pour qui que ce soit, montre ici ton adresse.
Dorimant
C’est comme je l’entends.