Scène V

Chrysante, Géron

Chrysante
Je devine à peu près le sujet qui t’amène ;

Mais, sans mentir, mon fils me donne un peu de peine,

Et s’emporte si fort en faveur d’un ami,

Que je n’ai su gagner son esprit qu’à demi.

Encore une remise ; et que, tandis Florange

Ne craigne aucunement qu’on lui donne le change ;

Moi-même j’ai tant fait que ma fille aujourd’hui

(Le croirais-tu, Géron ?) a de l’amour pour lui.

Géron
Florange, impatient de n’avoir pas encore

L’entier et libre accès vers l’objet qu’il adore,

Ne pourra consentir à ce retardement.

Chrysante
Le tout en ira mieux pour son contentement.

Quel plaisir aura-t-il auprès de sa maîtresse,

Si mon fils ne l’y voit que d’un œil de rudesse,

Si sa mauvaise humeur ne daigne lui parler *,

Ou ne lui parle enfin que pour le quereller ?

Géron
Madame, il ne faut point tant de discours frivoles.

Je ne fus jamais homme à porter des paroles,

Depuis que j’ai connu qu’on ne les peut tenir.

Si monsieur votre fils…

Chrysante
Je l’aperçois venir.

Géron
Tant mieux. Nous allons voir s’il dédira sa mère.

Chrysante
Sauve-toi ; ses regards ne sont que de colère.

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