Médée, Nérine
Médée
J’y donnerai bon ordre ; il est en ta puissance
D’oublier mon amour, mais non pas ma vengeance ;
Je la saurai graver en tes esprits glacés
Par des coups trop profonds pour en être effacés.
Il aime ses enfants, ce courage inflexible :
Son faible est découvert ; par eux il est sensible,
Par eux mon bras, armé d’une juste rigueur,
Va trouver des chemins à lui percer le cœur.
Nérine
Madame, épargnez-les, épargnez vos entrailles ;
N’avancez point par là vos propres funérailles :
Contre un sang innocent pourquoi vous irriter,
Si Créuse en vos lacs se vient précipiter ?
Elle-même s’y jette, et Jason vous la livre.
Médée
Tu flattes mes désirs.
Nérine
Que je cesse de vivre,
Si ce que je vous dis n’est pure vérité !
Médée
Ah ! ne me tiens donc plus l’âme en perplexité !
Nérine
Madame, il faut garder que quelqu’un ne nous voie,
Et du palais du roi découvre notre joie :
Un dessein éventé succède rarement.
Médée
Rentrons donc, et mettons nos secrets sûrement.