Scène VII

Tircis, Éraste, Mélite

Tircis

Éraste, arrête un peu.

Éraste

Que me veux-tu ?

Tircis

Te rendre

Ce sonnet que pour toi j’ai promis d’entreprendre.

Mélite, au travers d’une jalousie, cependant qu’Éraste lit le sonnet.

Que font-ils là tous deux ? qu’ont-ils à démêler ?

Ce jaloux à la fin le pourra quereller ;

Du moins les compliments, dont peut-être ils se jouent,

Sont des civilités qu’en l’âme ils désavouent.

Tircis

J’y donne une raison de ton sort inhumain.

Allons, je le veux voir présenter de ta main

À ce charmant objet dont ton âme est blessée.

Éraste , lui rendant son sonnet.

Une autre fois, Tircis ; quelque affaire pressée

Fait que je ne saurais pour l’heure m’en charger.

Tu trouveras ailleurs un meilleur messager.

Tircis , seul.

La belle humeur de l’homme ! Ô dieux, quel personnage !

Quel ami j’avais fait de ce plaisant visage !

Une mine froncée, un regard de travers,

C’est le remerciement, que j’aurai de mes vers.

Je manque, à son avis, d’assurance ou d’adresse,

Pour les donner moi-même à sa jeune maîtresse,

Et prendre ainsi le temps de dire à sa beauté

L’empire que ses yeux ont sur ma liberté.

Je pense l’entrevoir par cette jalousie :

Oui, mon âme de joie en est toute saisie.

Hélas ! et le moyen de pouvoir lui parler,

Si mon premier aspect l’oblige à s’en aller ?

Que cette joie est courte, et qu’elle est cher vendue !

Toutefois tout va bien, la voilà descendue.

Ses regards pleins de feu s’entendent avec moi ;

Que dis-je ? en s’avançant elle m’appelle à soi.

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