Un soir que je rêvais dans ma chambre, déserte
Depuis sa mort,
Un oisillon s’en vint de la fenêtre ouverte
Raser le bord.
Il s’en vint, secouant du bec sa robe grise ;
Et sans effroi,
Sans façon, je le vis, à ma grande surprise,
Entrer chez moi.
C’était un rouge-gorge, un charmant rouge-gorge !
Comme à foison,
Le froid, ce vieux brigand des forêts, en égorge
Chaque saison.
« Tu viens mal à propos, lui dis-je, mais n’importe,
Cher étranger,
Je souffre trop pour voir souffrir. Tiens, je t’apporte
De quoi manger.
« Aimes-tu le maïs ?…Non. Préfères-tu l’orge
Ou bien le mil ?
Que peut-on vous servir, monsieur le rouge-gorge,
Que vous faut-il ? »
Mais lui, de tous côtés promenant son bec rose
D’un air coquet,
Souriait sans répondre et cherchait quelque chose
Qui lui manquait :
Puis, comme il me trouvait par trop mélancolique,
Le polisson
Se mit à fredonner un morceau de musique
De sa façon.