I. — L’animisme

Munis de cette définition, nous pouvons nous mettre à la recherche de la religion élémentaire que nous nous proposons d’atteindre.

Les religions même les plus grossières que nous fassent connaître l’histoire et l’ethnographie sont déjà d’une complexité qui s’accorde mal avec l’idée qu’on se fait quelquefois de la mentalité primitive. On y trouve, non seulement un système touffu de croyances et de rites, mais même une telle pluralité de principes différents, une telle richesse de notions essentielles qu’il a paru impossible d’y voir autre chose que le produit tardif d’une assez longue évolution. D’où l’on a conclu que, pour découvrir la forme vraiment originelle de la vie religieuse, il était nécessaire de descendre par l’analyse au-delà de ces religions observables, de les résoudre en leurs éléments communs et fondamentaux et de chercher si, parmi ces derniers, il n’en est pas un dont les autres sont dérivés.

Au problème ainsi posé deux solutions contraires ont été données.

Il n’existe, pour ainsi dire, pas de système religieux, ancien ou récent, où, sous des formes diverses, on ne rencontre côte à côte comme deux religions, qui, tout en étant étroitement unies et en se pénétrant même l’une l’autre, ne laissent pas cependant d’être distinctes. L’une s’adresse aux choses de la nature, soit aux grandes forces cosmiques, comme les vents, les fleuves, les astres, le ciel, etc., soit aux objets de toute sorte qui peuplent la surface de la terre, plantes, animaux, rochers, etc. ; on lui donne pour cette raison le nom de naturisme. L’autre a pour objet les êtres spirituels, les esprits, âmes, génies, démons, divinités proprement dites, agents animés et conscients comme l’homme, mais qui se distinguent pourtant de lui par la nature des pouvoirs qui leur sont attribués et, notamment, par ce caractère particulier qu’ils n’affectent pas les sens de la même façon : normalement, ils ne sont pas perceptibles à des yeux humains. On appelle animisme cette religion des esprits. Or, pour expliquer la coexistence, pour ainsi dire universelle, de ces deux sortes de cultes, deux théories contradictoires ont été proposées. Pour les uns, l’animisme serait la religion primitive, dont le naturisme ne serait qu’une forme secondaire et dérivée. Pour les autres, au contraire, c’est le culte de la nature qui aurait été le point de départ de l’évolution religieuse ; le culte des esprits n’en serait qu’un cas particulier.

Ces deux théories sont, jusqu’à présent, les seules par lesquelles ont ait tenté d’expliquer rationnellement

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