Tout autre est l’esprit dont s’inspire l’école naturiste.
Elle se recrute, d’ailleurs, dans des milieux différents. Les animistes sont, pour la plupart, des ethnographes ou des anthropologues. Les religions qu’ils ont étudiées comptent parmi les plus grossières que l’humanité ait pratiquées. De là vient l’importance primordiale qu’ils attribuent aux âmes des morts, aux esprits, aux démons, c’est-à-dire aux êtres spirituels de second ordre : c’est que ces religions n’en connaissent guère qui soient d’un ordre plus élevé
Dès que, à la suite des frères Grimm, on se fût rendu compte de l’intérêt qu’il y avait à comparer les unes avec les autres les différentes mythologies des peuples indo-européens, on fut vite frappé des remarquables similitudes qu’elles présentaient. Des personnages mythiques furent identifiés qui, sous des noms différents, symbolisaient les mêmes idées et remplissaient les mêmes fonctions ; les noms mêmes furent rapprochés et l’on crut pouvoir établir que, parfois, ils n’étaient pas sans rapports. De telles ressemblances ne paraissent pouvoir s’expliquer que par une communauté d’origine. On était donc conduit à supposer que ces conceptions, si variées en apparence, provenaient, en réalité, d’un fond commun dont elles n’étaient que des formes diversifiées et qu’il n’était pas impossible d’atteindre. Par la méthode comparative, on devait pouvoir remonter, par-delà ces grandes religions jusqu’à un système d’idées beaucoup plus ancien, jusqu’à une religion vraiment primitive dont les autres seraient dérivées.
Mais ce qui contribua le plus à éveiller ces ambitions, ce fut la découverte des Vedas. Avec les Vedas, en effet, on avait un texte écrit dont l’antiquité, sans doute, a pu être exagérée au moment où il fut découvert, mais qui ne laisse pas d’être un des plus anciens dont nous disposions dans une langue indo-européenne. On se trouvait ainsi en état d’étudier, avec les méthodes ordinaires de la philologie, une littérature aussi ou plus vieille que celle d’Homère, une religion qu’on croyait plus primitive que celle des anciens Germains. Un document d’une telle valeur était évidemment appelé à jeter une lumière nouvelle sur les débuts religieux de l’humanité, et la science des religions ne pouvait manquer d’en être renouvelée.
La conception qui prit ainsi naissance était si bien commandée par l’état de la science et la marche générale des idées qu’elle se fit jour presque en même temps dans deux pays différents. En 1856, Max Müller en exposait les principes dans ses Oxford Essay
Comme nul ne les a présentés sous une forme plus systématique que Max Müller, c’est à lui que nous emprunterons de préférence les éléments de l’exposé qui va suivre