Préface

Avoir été le plus grand auteur dramatique de son temps – avoir été l’homme le plus aimé et le plus haï du XVIII e siècle – avoir été léger, narquois, rusé, mordant, avoir eu de l’esprit comme quatre et de l’audace à revendre – avoir aimé l’amour et dévoré la vie – s’être mêlé de tout ce qui ne le regardait pas – avoir démasqué l’imposture, combattu l’injustice et fouaillé la sottise – avoir été l’instigateur de l’événement politique le plus considérable de son époque – avoir changé trois fois de nom – avoir eu cinquante navires, avoir été l’agent secret du Roi – avoir souffert la médisance et toléré l’ingratitude – avoir été mis en prison trois fois – et ne s’être jamais départi d’un sourire propre à le faire exécrer jusqu’au jour de sa mort – propre à le faire aimer toujours – n’était-ce pas assez pour devenir le personnage central d’une comédie – qui ressemblerait à un roman d’aventure si notre héros n’était pas l’intelligence même ?

Or, cette comédie, je l’ai faite tandis que je composais un film intitulé : « Franklin et Beaumarchais – la France et l’Amérique. » Et lorsque l’un fut terminé, je me suis aperçu que l’autre était finie.

Et si je la publie, avant qu’elle ait été jouée, c’est bien pour la raison qu’il serait difficile de monter à l’heure actuelle un spectacle comportant un si grand nombre de décors et une telle quantité de personnages.

Pourtant, je n’ai pas cru devoir souligner les répliques – par-ci, par-là, – qui sont effectivement de ceux qui les énoncent.

Ce sont, là, surprises que je réserve à ceux qui commettraient l’imprudence de me les attribuer lors de la représentation – inespérée – de cet ouvrage.

S. G.

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