À Monsieur Finaud, Secrétaire perpétuel de l’Académie des Jeux Floraux, Toulouse.

Paris, 29 mars 1819.

Monsieur,

La flatteuse nouvelle que vous m’annoncez, et votre lettre plus flatteuse encore, m’ont causé une joie bien vive, joie qui aurait pourtant été plus grande encore si mon frère se fût trouvé mieux partagé dans les décisions de l’Académie. Quelque sévères qu’elles dussent lui paraître, je lui dois de reconnaître qu’il n’en a pas murmuré un seul instant et qu’il a été le premier à en proclamer la justice ; il me charge, monsieur, de vous remercier en son nom des éloges et des encouragements que vous voulez bien lui accorder. Son ode sur le duc d’Enghien, qu’il s’attache, en ce moment, à rendre plus digne de l’Académie, vous prouvera, sans doute, son empressement à se rendre à votre honorable invitation.

Pour moi, monsieur, je suis aussi confus de l’indulgence de l’Académie que pénétré de reconnaissance pour les marques éclatantes dont elle m’a honoré. Veuillez assurer messieurs vos collègues que je considère leurs suffrages plutôt comme un encouragement que comme une récompense, et que mes efforts n’auront désormais pour but que de me rendre digne des palmes glorieuses qu’il leur a plu de me décerner et que je me sens bien loin de mériter encore. Si le temps me le permet, c’est en souscrivant scrupuleusement à leurs critiques que j’essaierai de leur prouver mon désir de rendre mes deux pièces couronnées les moins imparfaites possible.

Je vous remercie, monsieur, d’avoir eu la complaisance de m’informer du sort des Derniers Bardes et de la Canadienne. En obtenant les honneurs de la lecture, ces deux pièces obtiennent encore plus que je n’en attendais.

Vous m’engagez, monsieur, à me décider promptement entre les fleurs ou leur valeur pécuniaire. Je préfère les fleurs : elles me rappelleront dans tous les temps l’indulgence de l’Académie qui, sans doute, en me couronnant, a eu plus égard à ma grande jeunesse qu’à mon faible talent.

Agréez l’expression de ma très vive gratitude et du respect avec lequel j’ai l’honneur d’être, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.

V.-M. Hugo.

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