À Madame la Duchesse d’Abrantès.

Vous me comblez, Madame. Les petites images sont charmantes, la statuette est charmante, la lettre est plus charmante encore. Vous écrivez comme vous parlez, une lettre de vous, c’est vous. C’est spirituel, c’est suprême, c’est bon.

J’avais donné ce chiffon de papier à mon père. Il m’est revenu dans sa succession. Permettez-moi de le mettre à vos pieds. C’est le manuscrit de l’Ode à la Colonne. À qui l’offrirais-je si ce n’est à vous ? Vous êtes une de nos duchesses militaires, et femme du premier ordre en outre, ce qui ne gâte rien. Soyez donc assez bonne pour garder ce griffonnage en souvenir de moi.

J’y joins votre Album, sur lequel je transcris une des strophes de l’Ode.

Maintenant il faut que vous soyez assez aimable pour venir dîner avec nous ainsi que messieurs vos fils, jeudi 19 décembre. Je vous ferai dîner avec l’excellente famille de Bernard de Rasmont qui vous aime et qui vous admire. Répondez-moi un bon oui pour tous les trois. — À six heures.

Adieu. À bientôt, madame la duchesse. Si jamais je vous envoie sous enveloppe l’amitié profonde que j’ai pour vous, je n’écrirai pas dessus : fragile. J’irai vous voir dès que je serai sorti d’un travail infernal qui m’obsède en ce moment, et je mettrai tous mes hommages les plus dévoués à vos pieds.

Victor Hugo.

8 décembre.

Je parlerai à M. le duc d’Abrantès de son livre où il y a d’excellentes qualités de toute sorte et un véritable avenir.

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