À Monsieur Védel, directeur de la Comédie-Française.

Montmirail, 20 août 1838.

Monsieur,

Aux termes du jugement intervenu entre la Comédie-Française et moi et confirmé par arrêt, la Comédie-Française devait représenter Angelo un nombre de fois déterminé, du 20 novembre 1837 au 20 avril 1838, à peine de cent cinquante francs de dommages-intérêts par jour de retard. Aujourd’hui 20 août, ce nombre de représentations n’a pas encore été complété, et il résulte de là que la Comédie-Française serait en ce moment ma débitrice de la somme de dix-huit mille francs. Mais, monsieur, je ne vois aucune raison pour rien changer aux déterminations qui m’ont déjà porté à remettre à la Comédie la somme de deux mille quatre cents francs qu’elle me devait pour retards à la représentation de Marion de Lorme. Je suis même enchanté d’avoir encore cette occasion de reconnaître personnellement la bonne grâce et le bon goût dont vous m’avez donné plus d’un témoignage dans mes récentes relations avec vous. J’ajoute que je suis heureux de pouvoir adresser aussi ce remerciement à ceux de messieurs les Comédiens-Français qui m’ont secondé avec tant de zèle et de talent. Veuillez donc, monsieur le directeur, annoncer à la Comédie que je lui fais remise pleine et entière de la somme de dix-huit mille francs qu’elle me devrait en ce moment.

Recevez, monsieur, je vous prie, l’assurance de ma considération très distinguée.

Victor Hugo.

Pour ma Didine bien-aimée.

[1838.]

Merci de ta charmante petite lettre, ma Didine. Elle m’a été au fond du cœur. J’ai vu avec joie que tu aimes ton père comme il t’aime et que tu sens les belles choses comme lui. Tu as de mon sang dans les veines.

Écris-moi le plus que tu pourras, mon cher petit ange. J’aurai peut-être besoin plus d’une fois de ce rayon de soleil.

Tu as vu les bords de la Seine ; moi je vais voir les bords du Rhin. C’est encore plus beau. Quelque jour, je t’y conduirai. Pense à moi, chère enfant, et embrasse pour moi mon Charlot, mon Toto et ma Dédé. Vous êtes cinq là-bas qui remplissez mon cœur.

Ton petit père,

Victor H.

J’ai été un peu malade, mais je suis rétabli. Mes amitiés les plus tendres à M. Vacquerie.

À Léopoldine.

Je t’écris en hâte quelques mots, ma Didine, la poste va partir. Je serai demain soir 28 à Paris, à 8 heures, et je vous embrasserai tous, j’espère, après-demain. Recommande bien à ta bonne mère de faire tout ce que je lui ai écrit pour Joly et pour que je trouve une bonne à la maison.

J’ai vu Reims, et, au lieu d’une grande description, je t’en envoie un petit portrait. Je pense que tu aimeras autant cela. Dis à mon Charlot, à mon Toto et à ma Dédé que je leur ferai à chacun une image à Paris.

Je t’embrasse bien tendrement, ma Poupée, ainsi que ta mère bien-aimée et tous les sorciers. Embrasse pour moi ton grand-papa qui est aussi ton bon papa.

À bientôt. À après-demain.

Ton petit père.

V.

Épernay, 27 août [1838] midi.

Anténor Joly, directeur du journal Le Vert-Vert, obtint, par l’entremise de Victor Hugo, le privilège nécessaire à l’ouverture d’un théâtre ; il acquit et fit transformer la salle Ventadour qui devint le théâtre de la Renaissance, inauguré le 8 novembre 1838, avec Ruy Blas. L’Alchimiste, d’Alexandre Dumas, suivit immédiatement. Mlle Ida, actrice, était la maîtresse d’Alexandre Dumas ; elle avait, en 1833, joué le rôle de Jane dans Marie Tudor. Archives de la famille de Victor Hugo. Inédite. Victor Hugo, comme membre du Comité historique des Arts et Monuments, avait essayé d’empêcher la démolition de la grille Louis XIV qui entourait le jardin de la place Royale. Elle fut néanmoins démolie. Bibliothèque Nationale. Parue le 12 mai 1838. Archives de la famille de Victor Hugo. Archives de la famille de Victor Hugo. Archives de la famille de Victor Hugo.

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