À Madame Victor Hugo, chez Madame Vacquerie. À Villequier, par Yvetot {Seine-Inférieure).

De l’Assemblée, 30 7bre [1848].

Chère amie, je t’écris quelques lignes en hâte de l’Assemblée à travers une des plus effroyables tempêtes que j’y aie encore vues. Ta pensée et celle de ma Dédé me sont bien douces au milieu de ces choses sombres. Du reste, nous allons tous bien ici. Je mène ce soir les gamins au Vaudeville et nous souperons avec un beefsteack froid en rentrant ensemble à la maison. Je suis très content de ces pauvres enfants. Toto est charmant, Charles travaille, et me donne autant de satisfaction et de joie cette année qu’il me donnait de chagrin l’an dernier. S’il veut, il aura un bel avenir. Il me continuera. C’est là une hérédité qu’on ne détruira pas.

Je suis heureux de savoir mademoiselle Dédé bien gaie et bien portante ; moi je serais plus gai et mieux portant si elle m’avait écrit un mot. Je devrais la gronder, mais j’aime mieux l’embrasser. Je l’embrasse donc. Allez, mam’zelle !

Offre mes respects à ces dames. Mille amitiés à Auguste qui faisait de belle prose ici et qui fait de beaux vers là-bas. Il fait bien d’offrir la poésie à la nature et la critique à cet affreux Paris. J’ai remis ta lettre à Isidore. Le déménagement marche. Mme d’A. s’en occupe avec un dévouement admirable. Je songerai aux sonnettes. Il est probable que je parlerai d’ici à deux jours à l’Assemblée sur la peine de mort et la liberté de la presse. À propos, je me chamaille horriblement avec le conseil de guerre. Ton pauvre oncle en est tout pâle.

Je t’embrasse tendrement. À bientôt chère amie.

V.

Va prier pour moi près de mon pauvre doux ange.

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